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Mettant à profit les progrès rapides de l'informatique, les néo-nazis font aujourd'hui l'économie de disquettes (jeux néo-nazis) ou de fanzines dont la distribution comporte encore trop de risques et sont d’un coût relativement élevé. Ils utilisent le réseau informatique.
Les néo-nazis, les négationnistes et tous les autres extrémistes ont d’ailleurs vite compris le parti qu’ils peuvent tirer d’une utilisation rationnelle et systématique d’Internet. Milton J. Kleim dans son "On Tactics and strategy for Use... " (De la tactique et de la stratégie sur Use...) explique la stratégie élaborée :
" Internet offre de gigantesques possibilités pour permettre à la résistance aryenne de diffuser notre message aux inconscients et aux ignorants. C'est le seul média de masse dont nous disposons et qui est relativement épargné par la censure. C'est maintenant que nous devons nous emparer de cette ARME qu'est Internet afin de la manier avec habileté et sagesse. "
Dans une publication intitulée « La conspiration théorique », l’activiste autrichien Walter Ochsenberger écrit que : « La liberté de pensée est totale sur Internet (...) et que, dans le fond, Internet est le média démocratique le moins mauvais. » Olivier Bode, autre activiste, néo-nazi connu par les services de police et, co-organisateur (avec d’autres) des rassemblements de nostalgiques pour célébrer l’anniversaire de la naissance d’Adolf Hitler, écrit qu’on ne peut faire « que des louanges sur l’utilisation et les applications d’Internet.» Dans un commentaire destiné aux militants de la formation allemande du NDB, il est écrit : « Nous devons créer des zones libérées. Dans ces zones (dont Internet), nous exercerons notre pouvoir, gagnerons des militants, accentuerons notre militantisme et punirons tous les déviants et nos ennemis. » Sur un autre document, il est écrit : « Ce qu’il y a de pratique avec Internet, c’est qu’il nous permet d’échapper à la censure officielle. Chacun d’entre nous, avec des capacités pourtant réduites, peut atteindre ainsi l’opinion publique. Ce qui permet ainsi de diffuser nos informations et notre propagande, mais encore de retirer tous pouvoirs à ceux qui sont les gardiens de la bonne parole et les censeurs officiels. Et, ceci d’autant plus que sur Internet, chacun peut contrôler les autres. »
Ces quelques citations sont suffisamment explicites pour que nous les commentions. Elles révèlent toutes les logiques militantes extrémistes. L’outil Internet est pratique, il est d’un usage simplifié, il est consulté par le plus grand nombre et il n’est pas régulé. Pour les organisations terroristes et les groupuscules extrémistes il est donc devenu le vecteur par excellence pour diffuser de la propagande et mener toutes sortes d’actions. Par ailleurs, les extrémistes savent que, grâce à de puissants moteurs de recherches de plus en plus performants, l’Internaute lambda pourra en l’espace de quelques fractions de secondes se voir proposer les adresses de sites et avoir ainsi accès à des contenus très complets. Le temps est donc bien révolu ou quelques militants devaient acheter de la propagande dans quelques rares « libraires » plus ou moins bien achalandées.
Cette logique militante se retrouve donc à tous les niveaux du Web extrémiste. Prenons comme exemple la dizaine de sites des groupes néonazis dénommés Blood and Honor pour étayer notre propos. Blood and Honor sont représentés dans plusieurs pays (Espagne, USA, Danemark, Bulgarie, Bohême, Flandres, Norvège, Finlande, Grèce, Serbie, Ukraine, Russie, Pologne, Canada, Chili).
Comme d’autres mouvements politiques, les néonazis sont à la recherche d’adhérents, de militants ou de sympathisants. Chaque Blood and Honor développe donc son propre « département commercial », qui est chargé de créer et de diffuser du matériel de propagande. Le groupe Blood and Honor au Danemark, par exemple, diffuse dans toute la Scandinavie des cassettes, des CD, livres, fanzines et brochures, tee-shirt et fanions. L’organisation montre par ailleurs qu’elle peut contourner d’éventuelles interdictions en utilisant les sites Internet amis et en vendant sur ces sites du matériel de propagande. C’est le cas du site de Blood and Honor/Combat 18 qui propose à la vente plus d’une centaine de cassettes vidéo, des séries vidéo ou audio comme « Swedish skinheads » Skrewdriver, « kriegsberichter » ou Deutsche skinheads.
On se demande souvent si cette propagande peut avoir un impact quelconque auprès des adolescents et de quelques esprits faibles ? Pour répondre à cette question et illustrer notre propos, nous avons choisi de parler de la fusillade qui était survenue le 20 avril 1999 dans un lycée de Littletown, de la banlieue de Denver, aux Etats-Unis. Quinze personnes ont été tuées, vingt trois autres ont été blessées et hospitalisées. Plus de trente bombes artisanales ont été découvertes dans l’établissement. Littletown pleura ses enfants, les médias s’accrochèrent aux témoignages des élèves du lycée, l’Amérique s’interrogea et le président des Etats-Unis se déclara « choqué et attristé ».
Les domiciles respectifs d’Eric Harris et de Dylan Klebord firent l’objet de plusieurs perquisitions. Des explosifs et des éléments nécessaires à leur confection ont été retrouvés chez le premier. L’arsenal assurait aux deux adolescents une impressionnante puissance de feu. Cela n’a pourtant rien d’extraordinaire dans un Etat où l’on peut se procurer une arme à 18 ans. Il est difficile d’expliquer cette folie meurtrière. Mais, le drame de Littletown télescope deux univers qui se superposent. D’un côté l’ « anxious class » qui a fui les villes et s’est réfugiée dans des banlieues protégées et confortables ; de l’autre, une sorte de « sous culture » misérable mais pas forcément pauvre qui se réfugie dans le virtuel, le rock metal et l’Internet, et « se nourrit de salmigondis apocalyptiques, largement infectés par les virus racistes et antisémites d’une idéologie de la « suprématie blanche » que colportent une multitude de prétendues « églises », de groupuscules et de bandes de skinheads. »
Nous apprîmes par la suite qu’Eric Harris et Dylan Klebord éprouvaient une évidente fascination pour le nazisme et le satanisme. Selon plusieurs élèves, le massacre aurait été déclenché le 20 avril pour célébrer l’anniversaire de la naissance d’Adolf Hitler. Eric et Dylan aimaient se parler en allemand, abordaient quelquefois des croix gammées sur leurs manteaux noirs. L’un et l’autre adoraient également ces jeux de violence virtuels et les sites sur l’Internet qui banalisent le viol, la torture, le meurtre. L’un et l’autre exaltaient les forts, se fascinaient pour les meurtriers en série et se délectaient de la violence qui est présentée à l’écran. Eric Harris et Dylan Klebord écoutaient aussi de la techno allemande et surtout du death metal, le fameux rock satanique.
De quoi parlons-nous au juste ? Au début des années 80, des formations comme Megadeth et Slayer se signalent et flirtent avec des thèmes terrifiants. Megadeth a eu sa ration de polémique quand Andy Merrit, un jeune fan de quinze ans de Houston, tua sa mère pendant qu’il écoutait la chanson Go to Hell (Va en Enfer). Merrit expliqua que le Diable lui était souvent apparu lorsqu’il écoutait la musique de Megadeth, et qu’il lui avait dit d’en finir avec sa mère. Pour sa part, le groupe Slayer débuta en 1984 avec un album cruel et sec : Show no mercy (Ne montre aucune pitié). Les membres du groupe prenaient souvent des poses fascistes et nazies, reprises par la suite par un nombre important d’adeptes, parmi les groupes de metal les plus obscurs. L’une de leur chanson, Angel of death est dédiée à Joseph Mengele, extraits : « Auschwitz, la signification de la douleur, la raison pour laquelle je veux que vous mouriez. Mort lente, immense détérioration (…) Quatre cent mille de plus vont mourir. Ange de la Mort. Chirurgien sadique du trépas. Sadique de la plus noble lignée. Détruisant sans pitié au bénéfice de la race aryenne… » Slayer est relayé aujourd’hui par d’autres groupes et chanteurs (Metal Christ Agny, Dark Funeral, Demonic, Impaled Nazarene, Infernum) D’autres formations comme Dimmu Borgir exaltent leur aversion du judéo-christianisme ; se collent au satanisme (Infestead, Mactatus ou les Norvégiens de Crest of Darkness) ; évoquent le nazisme (Panzer Division) ou peuvent avoir un effet pervers sur la jeunesse, comme Angel Dust, dont l’une des chansons, « Bleed » parle de quelqu’un qui devient fou, qui s’enferme petit à petit dans une horreur quotidienne, sur laquelle il n’a pas de prises.
Au regard des quelques exemples dont nous venons de parler, il paraît évident que des textes et/ou chansons violentes, racistes et antisémites constituent autant d’incitations à la haine. Ces « objets » si facilement consultables sur l’Internet vont attiser des individus et les pousser au crime. En somme, le Web extrémiste est devenu un libre service édifiant. Les « objets » sont vendus avec une incroyable facilité et une étonnante permissivité. On peut acheter sur le Web son attirail du «parfait » néonazi de la tête aux pieds, armes comprises. Et à titre d’exemples, nous reproduisons dans ce tableau une liste de quelques CD ou DVD vendus sur le Web :
Groupes | Titre des albums |
ARYAN | New storm raising |
ASGAARD | Sieg des glaubens |
ASGAARD | Der sturm brich los |
BATTLESONE | No where to hide |
BERSERKERNA | Tor hjelpe |
BOOT BOYS VOL.1 | Vidkuns Venner, marsjer m.m |
BRIGAD WOTAN | Sverige i brand |
BRUTAL ATTACK | The best of Brutal Attack |
BRUTAL ATTACK | Valiant Heart |
BRUTAL ATTACK | Greatests Hits |
BRUTAL ATTACK | Tales of glory |
BRUTAL ATTACK | Steel rolling on |
BRUTAL ATTACK | Resurrection |
BRUTAL ATTACK | Battle Anthem |
BLUE EYED DEVILS/AGG.ASSAULT | Hate crimes |
CELTIC WARRIOR | Let the battle begin |
CELTIC WARRIOR | We will never forget |
DAS REICH/NATION | Triumph of the will |
DAS REICH/NATION | New beginning |
DAS HEER | Soldatenlieder der Wehrmacht, marsjer |
DIVISION S | Hate |
DIVISION S | Attack |
FINAL SOLUTION | White revolution |
FINAL SOLUTION | Live |
FURIO DAL GHETTO | Italiensk samle cd |
KRAFTSCHLAG | Nordvind |
KRAFTSCHLAG | Trotz verbot nicht tot |
RAHOWA | Cult of the holy war |
RAHOWA | Declaration of war |
SKREWDRIVER | The strong survive |
SKREWDRIVER | After the fire |
STORM/FREIKORPS | Split-cd |
STORM | Hell seger |
SKINHEADLEGION | Classic swedish OI! |
SVASTIKA | In hoc signo vinces |
SVASTIKA/NO REMORSE | We play for you, live |
WAFFEN SS | Leibstandarte SS Adolf Hitler, marsje |
Djihadistes à l’assaut du Web :
Les islamistes surfent également sur le réseau pour se tenir informés et coordonner leurs actions, en toute impunité, à travers des mots clés, des adresses plus ou moins fictives, ayant pour siège souvent un bureau quelconque soit dans une université ou sur la simple boîte postale d'une association introuvable, comme le site Mouvement islamique (dont le siège se trouve à Lancester, en Grande-Bretagne) du Parti islamiste britannique. Même les Frères musulmans surfent sur le web. Leur site, installé au Royaume-Uni, affiche en première page leur slogan et propose une biographie en anglais de leur fondateur historique le cheikh Hassan el-Banna, ainsi que la littérature du mouvement.
Dans les pays francophones, une vingtaine de sites fondamentalistes qualifient systématiquement l’ennemi, en appellent au Djihad et encouragent les attentats terroristes. Ces sites développent des thèses anti-occidentales qui trouvent leur justification, sous une forme ou sous une autre, dans les textes sacrés, vus et corrigés par leurs auteurs. Sur Aslim-Taslam ou sur le portail fondamentaliste français de Stcom.net on s’étend longuement sur la corruption de la parole divine (le Coran) par les Juifs et les Chrétiens, qui prêchent par anthropomorphisme, associationnisme et idolâtrie. Par exemple, sur le site d’Al Mourabitoune, un auteur rappellait que l’un des prédicateurs d'une des mosquées d'Europe avait déclaré qu'il n'est pas permis de considérer les juifs et les chrétiens comme des mécréants. Comme l’auteur du texte estimait que la majeure partie des gens qui s'occupent des mosquées en Europe ont très peu de connaissances et qu’il craignait que de telles déclarations se répandent, l’auteur du texte publia un extrait de la Fatwa « l-Islamiya » du Cheikh Mouhammad Saleh Ibnoul Outhaymine : « Ce qu'a dit cet homme induit en erreur son auditoire. En fait, on peut considérer ceci comme un kufr (blasphème) car Allah a déclaré que les juifs et les chrétiens sont des incrédules (koufar) dans Son Livre. Les juifs ont été décrits comme ceux qui ont mérité la colère d'Allah. C'est parce qu'ils ont su la vérité et ont choisi d'aller à son encontre. Les chrétiens ont été décrits comme ceux qui se sont égarés. C'est parce qu'ils ont cherché la vérité mais se sont trompés. Maintenant, tous savent la vérité et le reconnaissent. Cependant, ils vont à son encontre. Par conséquent, ils méritent tous d'avoir la colère d'Allah sur eux. J'appelle tous ces juifs et chrétiens à croire en Allah et tous ses Messagers. »
Sur ces sites, d’autres textes véhiculent la théorie du grand complot. Ce complot serait fomenté pour déstabiliser le monde et selon les auteurs de ces textes, la troisième guerre mondiale sera forcément dirigée contre l’Islam. Aussi, plusieurs rumeurs se développent-elles. Elles reprennent à leur compte la fameuse thèse qui a été développée par Thierry Meyssan, qui prétend dans son livre « l’effroyable imposture » (Carnot, 2002) qu’aucun avion ne se serait écrasé sur le Pentagone, le 11 septembre 2001, et que l’explosion serait en réalité un attentat qui aurait été perpétré par des militaires américains poursuivant de sombres dessins antidémocratiques. Sur le site falestine -qui était hébergé par le portail fondamentaliste francophone Stcom.net- un auteur se demandait à qui ont profité les attentats du 11 septembre 2001 ? «Aux musulmans ? Non bien sûr, puisqu’ils en sont les grands perdants sur tous les points de vue ! Aux américains et aux sionistes ? Oui, à l’unanimité ! Ils sont les grands bénéficiaires sur tous les points de vue : économique, militaire, en terme de prestige et de communication. Avec ces attentats se sont définitivement tues les sympathies et les voix des opprimés palestiniens. Et, aujourd’hui, les crimes continuent de plus belle sans qu’aucune voix dans le monde s’élève pour condamner ces crimes ! »
Sur ces différents sites, il se développe donc une argumentation que nous pourrions résumer de la manière suivante : les attentats du 11 septembre 2001 servent les intérêts américains et Juifs. Ils sont un prétexte pour envahir l’Afghanistan puis l’Irak. Et, au nom de la lutte antiterroriste, les américains vont envahir d’autres pays arabes et l’Iran. Ils surveillent également les sites nucléaires pakistanais et empêchent l’Iran de se doter de l’arme nucléaire. Par ailleurs, les américains continuent de soutenir Israël, qui jouit ainsi d’une immunité totale. Les Américains préparent ainsi militairement et psychologiquement leur peuple à affronter l’Islam. La troisième guerre mondiale surviendra alors. Pour les auteurs de ces textes, il semble évident que les attentats du 11 septembre ont été perpétrés par des agents de la CIA ou du Mossad. Mais, l’argumentaire sur les attentats du 11 septembre reste marqué par l’ambivalence. La négation de l’implication de musulmans se conjugue à un contentement, « justifié » par la persécution des musulmans dans le monde qui ont enfin donné une bonne leçon aux USA et par des fatwas légitimant de tels actes.
Il faut reconnaître que sur ces sites qu’ils fussent en langue arabe, anglaise ou française, le musulman est essentiellement présenté comme une victime, alors que tous les moyens seraient utilisés par les américains, russes, juifs, chrétiens ou indiens pour détruire la communauté musulmane (la Oumma). En règle générale, ces sites s’identifient d’abord à la cause palestinienne. Le sionisme est globalement vu et perçu comme la manifestation contemporaine et ultime de cette aspiration occidentale à dominer le cœur du monde islamique et arabe. L’identification est à cet égard incomparablement plus forte qu’elle ne l’est pour les musulmans bosniaques (tardivement islamisés) ou les Tchétchènes, pour les habitants du Cachemire ou pour les groupes fondamentalistes qui combattent aux Philippines ou en Indonésie. Et cette cause n’est pas essentiellement présentée comme une cause nationale (un pays à créer, la Palestine), mais comme la défense d’un Islam assiégé par les Croisés (juifs et chrétiens).
Aussi de fil en aiguille et à force de prétendre que l’Islam est assiégé et qu’une guerre totale est engagée contre les musulmans, les fondamentalistes encouragent-ils le Djihad ainsi conçu, prononcé si ce n’est encouragé.
Si l’on tape par exemple, dans le moteur de recherche Google « Faire le djihad », on reçoit, en vrac plus de 31.000 réponses. L’une d’entre elles pose une question : « Le Djihad apporte t-il plus de mal ? » Ouverture de la page d’accueil : « Bienvenue au site Coran et Sunnah ». Puis, la réponse est donnée par le Cheik Ali Ben khudeir Al Khudeir : « le fait de dire que le djihad apporte des inconvénients entraîne l’abolition du djihad et l’abolition des opérations qui dérangent et affaiblissent l’ennemi. En fait, il n’existe aucun acte de djihad qui n’entraîne pas des pertes matérielles et/ou humaines. Si l’on présume que les victimes (du 11 septembre 2001) sont innocentes et que les opérations ont apporté du mal (aux musulmans), il ne faut pas oublier que les innocents tués par l’Amérique sont beaucoup plus nombreux et le mal qu’ont causé l’Amérique et ses alliés est plus terribles et plus abominable. »
Sur le site francophone islamiya.net les internautes pouvaient poser des questions et soumettre leurs remarques au cheikh Muhammed Saleh Al Munajjid. Officiellement, le site condamnait les attentats sur sa page d’accueil. Pourtant on pouvait lire : « …Peut-on considérer le djihad comme une obligation pour nous tous, étant donné que les droits des musulmans sont bafoués, en raison notamment de l’invasion étrangère ? …S’engager dans le djihad pour élever le mot d’Allah, protéger l’islam, assurer les moyens de sa diffusion et sauvegarder ses institutions sacrées est une obligation pour celui qui est capable. Mais, il faut que d’abord les oulémas incitent les chefs musulmans à créer des armées bien organisées et disciplinées. Si les chefs prennent cette initiative, ceux qui sont aptes à se battre doivent les suivre. Dans ce cas, quiconque refuse d’y participer sans excuse est sous doute un pécheur….Si vous deveniez un soldat chargé de combattre les juifs ou d’autres infidèles, soyer sincère dans le combat que vous leur livrez, ayez l’intention d’assurer le triomphe de l’islam et des musulmans et de faire en sorte que le mot d’Allah soit le plus élevé et le mot de la mécréance sera alors pour la cause d’Allah »
Dans le texte intitulé « L’avis islamique concernant la permission de réaliser des opérations martyrs », sur Stcom.net, l’auteur sacralise les opérations « martyrs » et réfute la dénomination « d’attentat suicide » qui en est faite : « En fait, les Juifs ont choisi ce mot pour dissuader les gens d’y recourir. O combien est notoire la différence entre celui qui se suicide parce qu’il est malheureux … et celui qui fait sacrifice de sa personne en se lançant dans l’opération – parce que sa foi et sa conviction sont fortes et qu’il désire donner victoire à l’Islam en sacrifiant sa vie pour que la parole d’Allah soit la plus élevée ! » Dans ces pages on apprend que le Djihad est une obligation, et non une option facultative pour tous les musulmans mâles, sains, et matures. « Nos frères martyrs ont écrit de leur sang une histoire dont nous pouvons être fiers et le sacrifice de leur personne ne fait qu’accroître notre désir de mourir en martyr, afin de rencontrer Allah et d’être ressuscité en compagnie du Prophète (paix et bénédiction sur lui), de ses compagnons et de tous les autres prophètes, des martyrs et des pieux. »
Sur un autre site (sajidine.com), le djihad est présenté comme « la voie de Dieu » : « Le djihad islamique, avec ses conditions, ses règles et ses usages, fut une source bienfaitrice et une bénédiction générale pour le monde, une grâce pour l'humanité. Depuis qu'il a cessé d'être observé, le monde est privé de ses profits et de sa bénédiction. Les guerres ethniques, nationales, lucratives et politiques, ainsi que les révolutions locales ont pris sa place, par lesquelles ce n'est guère la face de Dieu qui est désirée ni la suprématie de la Parole de Dieu qui est visée, ni le fait de sauver l'humanité de la Grande ignorance (al-Jâhiliyya) et de l'adoration des idoles, ni la purification de l'âme et sa quiétude. L'humiliation toucha ainsi les musulmans ; ils perdirent leur valeur et le poids qu'ils représentaient, suite à son abandon…. Or, le djihad ne se limite pas au combat, lequel peut constituer sa meilleure forme lorsqu'il est nécessaire. En fait, tout effort engagé pour la suprématie de la Parole de Dieu et de sa religion fait partie du djihad… Il n’est pas permis aux musulmans de rester indifférents à ce qui arrive à leurs frères en religion et aux opprimés parmi eux, ceux qui subissent l’injustice, l’humiliation, la persécution et toutes sortes de cruautés dans un pays quelconque, leur sort étant de professer l’Islam… »
Pour terminer mentionnons la Fatwah de cheikh Salman ibn Fahd al-'Awdah Hafizahullah sur le statut des opérations martyrs en Islam : « Quant à celui qui frappe jusqu'à la mort, alors ça doit être sous le contrôle de gens qui ont de l'expérience comme nous l'avons cité, pour s'assurer qu'il y aura des morts et des blessés, qu'il y aura de gros dégâts, que la terreur soit répandue chez les ennemis, que ça les pousse à rentrer chez eux sans pour cela engendrer des représailles graves de leur part, tel que se venger en tuant des innocents, ou la destruction des villes et des villages, ou toute chose semblable. »
Racistes à l’assaut du Web :
Nous savons que le Net est utilisé par toutes sortes de mouvances extrémistes. Pourquoi ne servirait-il d’ailleurs pas à ces groupuscules, groupes et partis puisqu’il est peu onéreux, et très adapté pour faire parler de soi ou organiser de mauvais plan ? Les extrémistes utilisent donc ce médium qu’est l’Internet. Ils le rentabilisent, exploitant sans limite et sans vergogne ce qui s’offre à eux. Aussi, les sites qui stigmatisent les immigrés (africains, asiatiques, arabes, turcs et kurdes…) sont légions sur le net. Des exemples récents éclairent d’ailleurs la dangerosité du phénomène.
En mars 2001, un nouveau site fait son apparition, SOS-racaille.org. Entre temps, le site de SOS-racaille.org a récupéré un autre site, celui de Radikalweb, qui est connu par les Internautes pour ses positions outrancières et fascisantes. Le site de SOS-racaille.org est donc lancé et se caractérise aussitôt par des propos d’une incroyable violence et des menaces de toutes sortes. Le 1er septembre 2001, un autre site apparaît dans le giron de SOS-racaille, aipj.net. Ce site soi-disant dédié à l’actualité internationale, fustige sarcastiquement ou violement tout ce qui peut se passer dans la sphère arabo-musulmane. L’extrait ci-joint donne le ton : « Il faut donc réfléchir, voulons-nous vraiment jeter l'ensemble de la civilisation occidentale, et la voir remplacée d'ici quelques décennies par une sorte d'islam « à la française », conquérant par démographie et intimidation ? Certains articles font état de 7 à 8 millions de musulmans en France (voir le site revue-politique.com), qui représenterait dans certains endroits entre le tiers et la moitié des moins de 20 ans. Et c'est sans compter l'importation des nouveaux immigrés, en général qui ne sont pas bouddhistes ni hindouistes pour majorité (pourquoi ?). Ou bien refusons-nous ce scénario ? »
En septembre 2002, SOS-racaille.org annonce l’ouverture d’un site postiche, Oumma.org, qui se présente comme « Site de référence de l’Islam à la Française. » Oumma.org est alors enregistré dans la plupart des moteurs de recherche, procédé ingénieux afin d’attirer des Internautes peu sensibles à leurs thèses. En consultant un moteur, l’Internaute devait imaginer que le site d’Oumma.org parlait de la communauté musulmane de France et de l’Islam. Il n’en est rien. Il suffit de regarder la page de garde pour s’apercevoir immédiatement de la duperie : site « sponsorisé par l’Association des Eleveurs de Porcs Français »… Ce site se caractérise par des attaques véhémentes contre la religion musulmane et le monde arabe.
En octobre 2002, deux autres sites voient le jour, l’un après l’autre. Pour commencer le site dénommé MRAV, où l’on conspue les mouvements antiracistes. Vient ensuite le site nommé 5ème colonne, afin de « découvrir les collabos de la racaille et l’invasion musulmane en France ». Dans son édition du mois de février 2003, 5ème colonne s’en prend violemment au Président de la République. Un article de 8 pages ironise sur ses « amitiés irakiennes », en des termes d’une rare violence : « Jacques Chirac, se place (…) de plus en plus à la pointe de la collaboration avec les pays arabes, en tête de la 5ème colonne de l’invasion musulmane en France… » En décembre 2002, deux nouveaux sites font leur apparition : année-algérie.org, de la « République bananière Algérienne antidémocratique et impopulaire » ; et Elysée-2007.org, qui fustige la classe politique et l’Elysée.
Enfin et comme si plus rien ne pouvait empêcher que la constellation qui s’est construite autour de SOS-racaille.org ne puisse être contenue, un nouveau réseau se créé en janvier 2003 : Canal-resistance.net. Canal-resistance.net se présente comme le premier « réseau de sites luttant contre l’islamisation de la France » et annonce fièrement être fréquenté par « 15.000 visiteurs par jour ». Les sites racistes sont désormais réunis sur ce canal : resistance.féminine.org ; aipj.net ; Rance-intox ; Marre du Rap ; Photo choc ; Tribune libre ; Elysée-2007.org ; Ennemi intérieur ; Algérie Française ; Salam Alekoum ; Liberté d’expression sur l’Internet ; Réfractaires.org…
Et chacun de ces sites rivalisent en grossièreté. Dans Photochoc, par exemple, les animateurs du site présentent une galerie de photographies qui illustre comment « l’Islam déclare la guerre au monde occidental » Une autre galerie présente et dépeint l’Islam comme religion de « haine », de « violence » et de « terreur ». Le site s’en prend aussi aux politiques que les animateurs du site présentent exclusivement comme des « corrupteurs, corrompus et coupables… »
Sur le site de Réfractaires, Chirac est la cible désignée : « Président d’un pays occupé couverts d’esclaves islamo délinquants où règne l’apartheid et l’épuration ethnique (voir persécutions dans les banlieues envers les Français de souche non soumis et les Juifs), d’un pays devenu dans les derniers européens en économie, en voie de tiers mondialisation… et qui ne compte plus pour du beurre sur la scène internationale (voir en Côte d’Ivoire)… Voici notre Chirac devenu leader mondial de quelque chose : de la lutte contre les USA ! »
Sur Islam-vérité.org, la guerre mondiale est annoncée : « forfaiture islamique commise le 11 septembre 2001 contre le monde civilisé et visant les symboles de sa réussite, est l’ultime ouvrage fait aux démocraties occidentales. Ce jour d’infamie pour le monde civilisé, fut la preuve, pour ceux qui en doutaient de l’ignominie islamique, et de sa volonté de détruire le monde occidental ».
Sur SOS-musik.org, on se déchaîne également : « On constate qu'en laissant se développer quelques 1100 zones de non droit, terme politiquement correct inventé pour désigner les nouveaux bleds dans lesquels commerce des armes, du sexe, de la drogue et les trafics de toutes natures prolifèrent, les gouvernements successifs ont volontairement fabriqués des bombes à retardement qui finiront un jour par exploser, plus que sûrement sur l'ordre de quelque autorité religieuse islamique, seules autorités respectées par les hordes sauvages endoctrinées dès le berceau à la gamelle d’un Coran sinistrement transformé en arme du crime mal déguisé sous des atours prétendus de paix, de tolérance et de respect de l'autre qui ne sont aucunement inscrit au fronton des Mosquées. Nous assisterons alors à un nouveau Kosovo dans lequel nous serons les « ignobles Serbes » coupables de résister à l'invasion « des ventres musulmans ». Une partie de la population autochtone, subjuguée par les mensonges sans cesse répétés depuis 30 ans, donnera la main aux assassins au croissant en attendant de se la faire couper, charia oblige. »
Conclusion provisoire :
Si la liberté d’expression est un droit constitutionnel dans de nombreux pays européens, les instances judiciaires de ces pays estiment que les dispositions interdisant l’incitation à la haine raciale et la diffusion du racisme constituent des restrictions raisonnables et nécessaires au droit à la liberté totale d’expression.
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale considère que la liberté d’expression n’est pas un droit absolu mais qu’il est soumis à certaines limitations énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme (Article 29, Paragraphes 2 et 3 et Article 30) et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Articles 19 et 20) qui convertit en règles précises de droit international, les principes énoncés dans la susdite Déclaration. Ces limitations résultent d’un juste équilibre entre les obligations découlant de l’Article 4 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la nécessité de protéger ces libertés fondamentales.
La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale a fait l’objet le 07 mars 1966 d’une adhésion ou d’une ratification de la part de 148 Etats. Cette convention est le principal instrument juridique international visant à lutter contre la haine et la discrimination raciale.
Aux termes de l’article 4 de la Convention :
« Les Etats … s’engagent à adopter immédiatement des mesures positives destinées à éliminer :
toute incitation à la discrimination, ou tous actes de discrimination (raciale), et, à cette fin, tenant dûment compte des principes formulés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et des droits expressément énoncés à l’article 5 de la présente Convention, ils s’engagent notamment :
a) A déclarer délits punissables par la loi toute diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, toute incitation à la discrimination raciale, ainsi que tous actes de violence, ou provocations de tels actes, dirigés contre toute race ou tout groupe de personnes d’une autre couleur ou d’une autre origine ethnique, de même que toute assistance apportée à des activistes racistes, y compris leur financement ;
b) De déclarer illégales et à interdire les organisations ainsi que les activités de propagande organisée et tout autre type d’activité de propagande qui incitent à la discrimination raciale et qui l’encouragent et à déclarer délit punissable par la loi la participation à ces organisations ou à ces activités ;
c) A ne pas permettre aux autorités publiques ni aux institutions publiques, nationales ou locales, d’inciter à la discrimination raciale ou de l’encourager. »
Cependant, l'internationalisation du système rend l’Internet difficilement contrôlable. Aucune législation nationale ne peut encore réellement empêcher les transmissions, puisque tout serveur est accessible de n'importe quel point du monde. Par ailleurs, le terrain est si vaste, les intérêts si divergents (d'un pays à un autre), qu'il ne laisse pas de place à un code éthique.
De nombreux utilisateurs, centres universitaires et associations surveillent cependant de près ces marchands de haine, suivent leurs mouvements et réfutent leurs affirmations. Ils et elles rassemblent ainsi des milliers de documents, en les rendant tous accessibles sur Internet. Le résultat est là : les négationnistes et les néo-nazis ont malgré tout du mal à se présenter dans des forums de discussion car leurs affirmations sont réfutées de manière concertée. Parallèlement, quelques gouvernements ou hommes politiques mettent sur pied des commissions et des groupes de réflexion pour se pencher sur les problèmes liés à la libre expression sur Internet.
Que faire alors ? Doit-on encourager la liberté (totale) d’expression sur le net ? C’est principalement aux Etats-Unis, où l’on a une conception quasi absolutiste de la liberté d’expression, que l’on voit dans la réglementation des propos racistes une violation du droit constitutionnelle à la liberté de parole. La liberté d’expression est également un droit constitutionnel dans de nombreux autres pays. Néanmoins les instances judiciaires les plus élevées de ces pays estiment que les dispositions interdisant l’incitation à la haine raciale et la diffusion d’idées racistes constituent des restrictions raisonnables et nécessaires au droit à la liberté de parole.
Il est possible alors d’intenter une action en justice contre les sites racistes. Il dépend néanmoins du pays où l’on se trouve et de l’existence d’une législation adaptée. Mais dans l’essentiel des cas, les suites judiciaires sont rares. Dans ces conditions, quels sont les moyens dont nous disposons pour lutter contre la multiplication de sites négationnistes et racistes sur le net ? Il faut veiller à ce que, à aucun moment, ni le racisme, ni l’apologie du terrorisme ne puissent être considérées comme des opinions. De nombreuses méthodes peuvent alors être utilisées pour combattre ces déchets informationnels, notamment dans les domaines législatifs, de l’enseignement ou de l’information, notamment.
Ne conviendrait-il pas de proposer une norme à deux vitesses ? La criminalisation du discours raciste comme en France, en Belgique et en Suisse notamment. Et, en cas d'impossibilité constitutionnelle, la criminalisation de l'hébergement abusif destiné à contourner des lois. La pratique de l'hébergement abusif, par laquelle des "cyber-racistes" situent leurs serveurs dans des pays où la loi est moins sévère que le leur, devrait être sanctionnée par la loi. Par exemple, un site raciste français, s'adressant à un public français, mais hébergé par un serveur situé aux Etats-Unis, ne pourrait plus se cacher derrière les dispositions de la législation américaine protégeant la liberté d'expression. Nous estimons également que les hébergeurs ne peuvent constamment se retrancher derrière l’argument de la stricte neutralité, ils doivent balayer ces sites. Quant aux fournisseurs d’accès, nous pensons qu’ils seront bien obligés un jour de filtrer l’accès aux sites nauséeux même lorsqu’ils sont hébergés de l’étranger. Le législateur serait d’ailleurs bien inspiré de faire évoluer notre législation : tolérance zéro, telle devrait être le mot d’ordre. Il faudrait enfin créer un organisme de concertation ou de co-régulation au sein du Conseil de l'Europe dans le but de collaborer à l'élaboration de codes de conduite, servir de médiateur dans des conflits déterminés.
Comme le soulignait cependant un éditorial du quotidien Le Monde du 23 août 2002, « il vient en effet un moment où le nécessaire respect de la liberté d’expression se heurte à la non moins nécessaire protection des personnes visées par les injures et par les menaces proférées. »
(*) Marc Knobel est président de l’association de lutte contre le racisme et l’antisémitisme sur l’Internet J’Accuse, il est également chercheur au CRIF.