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Méditons en mémoire de ces victimes et continuons de chercher ensemble comment la France républicaine peut gagner son combat contre la haine antijuive
En France, le régime de Vichy a mobilisé la police française, pour accomplir l'opération, sur la base du « fichier juif » : en deux jours entre le 16 et le 17 juillet 1942 13 152 juifs, hommes femmes et enfants ont été arrêtés, bien souvent à leur domicile.
Les Allemands et leurs collaborateurs avaient espéré une « moisson » plus importante. Heureusement, des bruits avaient couru provenant en particulier de certains policiers français écœurés du travail qu’on allait leur faire faire. Ces bruits ont permis à certains de se mettre à l’abri quelques heures avant la rafle. Il s’agissait surtout des hommes. Peu de gens imaginaient que les rafles concerneraient aussi les femmes et les enfants.
Drancy fut l'antichambre de la mort ; ce fut vraiment la porte d’Auschwitz.
Ce camp a été pendant trois ans le principal lieu de départ de la France vers les centres de mise à mort, pour la majorité des convois vers Auschwitz.
Les couples sans enfants et les célibataires arrêtés lors de la Rafle du Vel d'Hiv, commencée le 16 juillet 1942 sont amenés à Drancy.
Les autres, pères, mères et enfants ont été enfermés au Vélodrome d’Hiver avant d’être progressivement internés dans les camps du Loiret.
Au Vel d’Hiv, les conditions de détentions sont dantesques : le manque d’hygiène, le manque de nourriture, le bruit, l’angoisse entrainent crises de nerfs et parfois suicides.
La rafle du Vel d’Hiv fut suivie de bien d’autres rafles, certaines effectuées dans une zone sud non occupée où les Juifs avaient encore plus l’impression que la France les protégerait du pire.
En tout 80 000 Juifs moururent, dont un grand nombre pendant la terrible année 1942.
76 000 Juifs de France moururent dans une déportation dont 3% à peine sont revenus.
3000 moururent dans les camps organisés en France et 1000 probablement furent fusillés dans notre pays.
71 ans jour pour jour après la rafle du 16 juillet 1942 il nous revient de replacer l’évènement dans le long cours de l’histoire nationale.
En 1995 un pas historique avait été franchi par la condamnation sans appel et sans esquive du régime de Vichy dans le processus de destruction des Juifs de France.
Les travaux des historiens, notamment ceux de Serge Klarsfeld, en avaient auparavant prouvé l’écrasante responsabilité.
La déclaration du Président Hollande l’an dernier au Vel d’Hiv a insisté sur ce fait majeur : les Allemands n’ont pas eux-mêmes contribué aux arrestations.
Une fois la culpabilité reconnue, on a pu rappeler le remarquable travail effectué par une partie de la population française, de toutes origines, ceux qui furent des Justes, même si Yad Vashem n’a pas pu attribuer le titre à tous ceux qui l’auraient mérité, grâce à eux le pourcentage de Juifs sauvés en France est pus important que dans la plupart des pays européens.
La loi instaurant la "Commémoration de la journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux Justes de France" rappelle que s’il y eut des salauds, il y eut aussi des personnes admirables.
Il est de notre devoir à nous tous, citoyens français, de n'oublier ni les uns, ni les autres.
Mais pourquoi faut-il commémorer si longtemps après ces événements ?
La Shoah n’est pas une histoire pour les Juifs. C’est une histoire pour chacun d’entre nous. Elle ne nous parle pas seulement des nazis et de leur horrible idéologie, elle nous parle du présent et elle nous parle de nous, Juifs et non-juifs.
Qu’aurions-nous fait ? Aurions-nous fait partie de la petite cohorte des sauveurs, du groupe des collaborateurs et des dénonciateurs, ou bien de la masse si nombreuse des indifférents et des lâches ?
L’enseignement de la Shoah, plus indispensable que jamais, n’est pas une prime donnée aux Juifs. Il vise à montrer jusqu’où l’idéologie, l’embrigadement et la pression de groupe peuvent conduire les individus. Il vise à montrer que ce qui s’est passé au cours de cette époque est un événement unique dans l’histoire, mais qu’il fut fait par des hommes ordinaires.
Et pourtant, cet effort considérable appuyé par une volonté politique forte ne nous immunise pas. Dans bien des collèges et des lycées, les leçons sur la Shoah sont difficiles, quand elles ne sont pas empêchées par des positions arc boutées sur une concurrence des mémoires insupportable nourrie en fond par un antisémitisme révélé, un antisémitisme et une détestation d’Israël qui se disent à voix haute dans les classes et dans les cours de certains établissements scolaires. Il revient aux professeurs, surtout dans les ambiances les plus hostiles, de tenir bon, c’est-à-dire de ne pas se laisser imposer de façon complaisante cette sous-pensée dans laquelle fleurissent les amalgames et les comparaisons qui ne sont que des incitations à la haine.
Je ne vous parle pas d’il y a 71 ans, je vous parle de faits récents
L’an dernier dans une école de Toulouse, trois enfants et un adulte ont été assassinés avec une violence inouïe, uniquement parce qu’ils étaient juifs.
Cette année les actes antisémites en France, ont augmenté de 58% malgré, ou pire encore, à cause des assassinats de Toulouse.
Je voudrais saluer une personnalité de ce département, M Sammy Ghozlan, pour son engagement constant dans la lutte contre l’antisémitisme.
Enfin, méditons, si vous le voulez bien, en mémoire de ces victimes et continuons de chercher ensemble comment la France républicaine peut gagner son combat contre la haine antijuive.