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-parce que les conditions, qui font d'une manifestation universitaire un lieu d'échange et de débat scientifique, ce qu'on appelle généralement un colloque, ne nous semblent pas remplies. Un colloque est un débat intellectuel où des chercheurs qualifiés tentent, sur la base de leurs recherches, d'apporter un éclairage sur différents objets méthodologiquement définis et épistémologiquement fondés. Dans le programme tel qu'il nous a été présenté, les moyens et les méthodes de cette recherche nous semblent instrumentalisés ;
-parce que l'Université est un lieu collectif d'apprentissage et de connaissance où doit s'exercer la pensée critique, où se développe une réflexion sur les fondements du savoir et sur les conditions de production du savoir, sur les acteurs/sujets qui le produisent, sur les enjeux de pouvoir qui les sous-tendent. À cette forme de pensée critique s'opposent donc la doxa et le dogme. Sans dialogue contradictoire, sans doute méthodique, la pensée n'est pas libre ;
-parce que la liberté d'expression s'arrête là où commence la propagande. On peut faire bien des choses pour la liberté d'expression, y compris, quand on s'appelle Noam Chomsky, préfacer un auteur négationniste, mais, selon nous, cette liberté n'a de sens à l'université que lorsqu'elle est fondée sur une totale liberté critique ;
-parce qu'une critique ferme du gouvernement israélien et de sa politique à l'égard des populations palestiniennes ne passe pas par le boycott de rares lieux où peut encore s'exercer cette liberté, à savoir les universités ; parce que la dénonciation de cette politique doit être dégagée de tout antisémitisme ; parce que nous pensons que le boycott de la résistance intellectuelle et politique est improductif pour lutter contre les multiples formes de discrimination et de domination que subit le peuple palestinien.
Tiphaine Samoyault enseigne la littérature comparée à l'université Paris-VIII-Saint-Denis
Claudia Moatti, historienne, professeur d'histoire romaine à l'Université Paris-VIII-Saint-Denis
Michèle Riot-Sarcey, professeure d'histoire contemporaine à l'université Paris-VIII-Saint-Denis.
Article publié dans l’édition du Monde du 27 février 2012