Tribune
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Publié le 10 Mai 2004

Si vous ne l’avez pas vu

Samedi 8 mai Thierry Ardisson recevait sur France 2 d’abord Bernard Henri Lévy. L’occasion pour celui-ci de préciser ses rapports avec le judaïsme, d’expliquer pourquoi il fallait soutenir le plan d’évacuation de Gaza plutôt que de le diaboliser - car c’était la première fois qu’un premier ministre israélien (qui plus est de droite) reconnaissait qu’Israël ne pouvait pas s’accrocher à ce territoire - et de remettre en place son interlocuteur qui avait affirmé qu’en Irak « la seule arme de destruction massive c’est l’armée américaine ». Immédiatement après son départ, il recevait l’humoriste Tomer Sisley. L’occasion de relancer le débat sur « peut-on rire de tout » et de réhabiliter Dieudonné qui de l’avis de tous (et même de Romain Goupil resté lui sur le plateau qui avait tout de même affirmé que son sketch était pour le moins malfaisant et pas naïf) était seulement « un peu pataud en politique » mais pas antisémite pour un sou.



Les jours se suivent et ne se ressemblent pas, dimanche nous a donné l’occasion de suivre deux excellents programmes. Ce fut d’abord à l’heure du déjeuner un étonnant reportage sur le Hamas proposé sur Canal + par Karl Zéro. Tout est dit sur cet organisation qui se prétend vis-à-vis de l’extérieur un simple mouvement de résistance contre l’occupant israélien et affirme à l’intérieur non seulement sa haine de tous les Juifs et son désir d’une Palestine vidée de ses Juifs, mais aussi son désir d’instaurer un Etat islamique sut tout le monde arabe.

Ce fut ensuite dans la soirée l’émission de Marc Olivier Fogiel qui consacra sa partie « actualité » à un reportage et un large débat sur l’antisémitisme. On a pu entendre d’abord Elie Seymoun confirmer qu’après les propos nauséabonds de Dieudonné sur un site Internet (rapportés par Marianne), après qu’il ait établi des listes de Juifs à la télé, il doutait « très sérieusement de son amour pour les Juifs » et qu’il jouait un jeu dangereux. Selon lui, les gens qui le soutiennent n’ont rien compris et ne connaissent pas ses propos. « C’est un grand commercial ». Une actrice espagnole reçue aussi sur le plateau a tenté de le défendre car « il est seul contre tous », mais a été interrompue par Marc Olivier Fogiel aussi bien que par Elie Seymoun. Aujourd’hui, a ajouté plus tard Elie Seymoun, « même défendre les Juifs devient suspect ». Il relève un SMS qui demande « A qui ça profite de dire que la France est antisémite ? ». Dans le reportage rappelant les derniers faits est reprise la phrase de Jacques Chirac « Quand on s’attaque à un juif, c’est à la France toute entière qu’on s’attaque ». On a pu entendre aussi Roger Cukierman (président du CRIF) parler de la profanation des cimetières comme d’une « violation des principes de la liberté et de la démocratie », et affirmer qu’on « a le droit de critiquer Israël, mais pas d’agresser les Juifs » ni « d’importer le conflit qui se situe à 4000 km d’ici et dans le quel on peut avoir des opinions divergentes, mais qui ne doivent pas se traduire par des violences ». De son côté Nona Meyer rappele que ces violences antisémites sont majoritairement le fait de jeunes issus de l’immigration maghrébine. Sur le plateau, Marek Halter a crié sa colère devant « l’apathie des français » face à ces violences. « Quand on commence à parler des Juifs on les brûle » a-t-il affirmé. Il a suggéré que tout le monde la semaine prochaine se lève à la même heure pour crier la même colère.

Deux bons points encore et des émissions que l’on peut revoir. D’abord, l’émission « trompe l’œil, miroir de guerre » diffusée par la chaîne Odyssée à plusieurs reprises (prochaine diffusion le 14 mai à 11h10, à ne pas rater). Un excellent reportage de Patrick Chauvel sur les photographes de guerre suivi d’un débat au cours duquel on a pu entendre par exemple cette phrase : « Les journalistes Palestiniens ont une culture de propagande, mais ils travaillent quand-même pour les grandes agences. Ils sont tout à fait sincères, mais ils ont une vision limitée », ou encore à propos de l’utilisation des images : « En Palestine, les mômes qui servent de leurre et lancent des pierres avec des tireurs derrière. Si on part, ils s’en vont ». Mercredi 5 sur France 2 le débat sur « Quel monde voulons-nous ? » (Culture et dépendances) a très vite dévié sur la montée de l’antisémitisme (l’émission repasse samedi 15 à 2h20 du matin sur TV5).

Anne Lifshitz-Krams