Il veut incarner une autre voie. Rifaat al-Assad, l’oncle du président syrien Bachar el-Assad, actuellement en exil à Paris, souhaite profiter de l’isolement diplomatique de son neveu pour prendre la tête du pays. Rencontré en exclusivité par Europe 1 dimanche 13 novembre 2011 dans un hôtel parisien, l’homme d’affaires demande à la France d’accueillir Bachar al-Assad et propose de le remplacer à Damas.
"Je suis personnellement prêt à prendre la responsabilité de rentrer en Syrie, à la fois pour rassurer les minorités et pour apaiser les cœurs", affirme-t-il sur Europe 1. "Ensuite, je partirai. Je m’engage à quitter le pouvoir. Je souhaite par ailleurs que la France accueille Bachar al-Assad. Ce serait une véritable solution pour sortir de la crise", poursuit celui qui vit aujourd’hui entre Paris, Londres et Madrid.
Né en 1937, Rifaat est le paria de la famille Assad. Longtemps membre du sérail, il est soupçonné d'avoir lancé ses troupes en 1982 à l'assaut de Hama, dans le nord du pays, tombée aux mains des islamistes sunnites (les Assad sont alaouites, minorité chiite, NDLR). La répression avait fait entre 10.000 à 25.000 morts, selon Amnesty International.
En 1983, alors que son frère Hafez al-Assad est hospitalisé, Rifaat, à la tête des "brigades de défense", tente un coup d'Etat. En vain. Cette trahison entraîne sa disgrâce. Rifaat est banni du territoire syrien. La haine entre les deux frères prend une nouvelle dimension en 1998. Hafez al-Assad décide d’écarter totalement son cadet du pouvoir au profit de son fils, Bachar. Rifaat est destitué du poste de vice-président. Depuis ce dernier épisode, le richissime homme d’affaires s’était fait plutôt discret.
Mais dimanche 13 novembre, Rifaat el-Assad est sorti de son silence. Il a ainsi pris la tête d'un nouveau mouvement d'opposition, le Conseil national démocratique, dont la direction est composée essentiellement de membres de son propre parti l'Alliance nationale démocratique unie et d'ex-membres du parti Baas au pouvoir.
"Poursuivre la résistance"
"J’appelle le peuple syrien à poursuivre la résistance car c’est sa seule et unique chance de reprendre le pouvoir", affirme sur Europe 1 Rifaat al-Assad. "Le peuple syrien subit l’oppression depuis 500 ans. Le monde est en danger. On se dirige vers une catastrophe. Certains pays doivent relever ce défi en allant en Syrie en qualité d’observateurs sous l’égide de l’ONU", poursuit celui qui n’a pas parlé à son neveu depuis 14 ans.
Pour cette mission, Rifaat al-Assad pense à des "Etats qui ont une expérience de la région, qui en sont proches. La Russie qui est proche de l’Est, l’Angleterre qui est proche de l’Ouest et la France de la Méditerranée", précise l’oncle exilé de l’actuel président syrien. "Tous les trois ont eu dans l’histoire une présence dans la région. Ils la connaissent bien. Ils savent comment la sortir de la crise. Ils ont suffisamment d’influence au conseil de sécurité de l’ONU pour lui faire envoyer une mission d’étude afin de voir clairement la situation sur le sol syrien", insiste Rifaat al-Assad.
Si rien n’est fait, Rifaat al-Assad dit craindre "que le conflit ne se transforme". "J’ai peur que nous passions d’un conflit entre la résistance et le gouvernement à un conflit entre le peuple et le peuple. C’est un scénario tout à fait probable. J’espère qu’il ne se produira pas", conclut-il.
Photo : D.R.
Source : Europe 1