En exclusivité le Secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants répond à la newsletter du CRIF :
1- Pourquoi cette exposition ? Pensez-vous que l’image de la police durant l’occupation doive être ré-analysée ?
Il ne s’agit pas de réévaluer le rôle des forces de gendarmerie et de police sous le régime de Vichy : les historiens ont mené, sur cette période, un travail considérable : le rôle de l’Etat et de son appareil dans l’application des lois scélérates ne peut pas être sous-estimé. Nous avons voulu rendre hommage à la mémoire des policiers et des gendarmes qui n’ont pas exécuté les ordres qui leur étaient donnés ou qui ont tenté, par tous les moyens, de les contourner. Ils allaient prévenir les juifs avant les rafles et les arrestations, ils les cachaient et les protégeaient. Ils ont agi en hommes et c’est cette humanité que nous voulons donner en exemple.
2- Vous avez intitulé cette exposition « Désobéir pour sauver, des policiers et des gendarmes français Justes parmi les nations ». Quelle distinction faites-vous entre la désobéissance et la résistance à cette époque de collaboration du régime de Vichy avec l’Allemagne nazie ?
Dans un état totalitaire, la désobéissance est une forme éminente de résistance. Dans Eichmann à Jérusalem, Hannah Arendt a montré que la mise en œuvre de la Shoah a reposé sur l’obéissance de chacun aux ordres qu’il recevait. C’est en cela qu’elle parle de la « banalité du Mal ». A Auschwitz, c’est le Mal absolu qui s’est déchaîné. Mais le Mal absolu ne vient pas de nulle part : il naît malheureusement dans une consternante banalité, où chacun est à sa place et accomplit sa propre tâche. En désobéissant aux ordres reçus, les policiers et les gendarmes déclarés par Yad Vashem « Justes parmi les nations » ont opposé à cette banalité du mal la banalité du bien. Ce qui est frappant dans les témoignages recueillis auprès de ces hommes exceptionnels, c’est qu’ils déclarent, tous unanimement : « C’était naturel de sauver des juifs. »
3- L'utilisation du terme résistance renvoie dans la mémoire nationale à lutte armée contre l'occupant nazi. Ce vocable aujourd'hui semble extrait du champ de l'histoire pour faire l'objet d'une prise d'otage idéologique et partisane inscrite dans une rhétorique de contestation du "système" et de l'autorité qui le représente. Que pensez-vous de ce glissement sémantique ?
Talleyrand l’a dit bien avant moi : « Tout ce qui excessif est insignifiant». Aujourd’hui, une certaine opposition a choisi d’utiliser l’insulte et l’injure pour critiquer l’action du gouvernement, je le regrette.
Propos recueillis par Stéphanie Dassa
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Photo : D.R.