Ce thème de l’identité juive, qui ouvre le livre n’est pas le seul, loin de là, que le rabbin Steinsaltz offre à notre réflexion. Avec finesse, il aborde la question de l’assimilation, remarquant que « la capacité que les Juifs ont à l’imitation est généralement bien plus profonde que chez les autres », l’unité de la Maison de Jacob autour de l’Etat d’Israël, le complexe messianique juif avec cette volonté renouvelée de vouloir, envers et contre tout et tous, sauver le monde, la « mission juive » qui n’est autre que le « rêve messianique » ancestral, la contribution disproportionnée des Juifs à la civilisation et au progrès du monde : « Aussi bien dans les sciences naturelles que dans les sciences sociales, la littérature, les arts, la vie politique et économique de chaque nation, la contribution des Juifs est surprenante ». De Marx à Einstein en passant par Freud, la chose est connue et reconnue.
Un chapitre original est consacré au thème désormais classique de l’opposition entre Torah et science. Notant qu’il y a, selon lui, peu de contradictions entre la Torah et les mathématiques, Steinsaltz, à notre sens, est un peu hâtif quand, par exemple, il considère que le fait que les savants aient calculé une valeur de p, avec un nombre impressionnant de décimales, à 3,14…et que le traité Erouvin propose 3 est « relativement sans importance ». Force est de constater que si le Talmud, avec les moyens de l’époque, donne ce chiffre approximatif, mais néanmoins remarquable, on ne saurait nier que la science, grâce aux ordinateurs, parvient à une précision exemplaire qu’il faut saluer.
Autres thèmes abordés : le mysticisme dans la pensée juive, le motif de la lumière, la prière, le péché, Le Cantique des Cantiques, enfin, histoire qui se passe, dit-il, dans un présent éternel.
« De nos jours, reconnaît le rabbin, la plupart des Juifs mènent une existence amphibie, comme des grenouilles. Ils vivent dans deux royaumes différents : celui du monde occidental et celui de la Torah ». Ce sont ces contradictions qui constituent la trame de ce beau livre qui incite à la réflexion d’autant que chaque chapitre de l’ouvrage est suivi d’un court débat.
Très intéressant.
Jean-Pierre Allali
(*) Editions Albin Michel. Préface de Jean Blot. Traduit de l’anglais par Danielle Lifshitz-Malka. Septembre 2008. 224 pages. 22 euros.