Voici plusieurs jours que, alerté par le Professeur Michel Goldberg, je connaissais l'affaire relatée ci-dessous. J'avais espéré, à la suite de mes entretiens avec les protagonistes, qu'elle se réglerait de façon raisonnable par le désaveu de la pièce en question par les autorités académiques (la pièce a été construite à partir de subventions publiques au travail d'écriture des étudiants de l'Université de La Rochelle).
Cela n'a pas été le cas. Le Président de l'Université ne voulant pas s'opposer à une partie de son conseil reste silencieux.
La pièce est antisémite, et je dirais même, grossièrement antisémite. Que ce soit de façon consciente ou inconsciente est sans intérêt ici. Comment qualifier autrement un texte où le financier s'appelle Goldberg, a une activité où l'appât du gain pousse sa famille à investir dans des activités exceptionnellement répugnantes et où des chasseurs de nazis sont prêts contre espèces sonnantes et trébuchantes à laisser tranquille un ancien criminel SS?
Il faut voir la pièce au second degré, nous dit-on. Nous connaissons cet argument. Comme si le public était prêt à analyser avec une subtilité pareille ce genre de travail. Il faudrait peut-être dans ce cas obliger les gens à lire "Bagatelle pour un massacre" ou à assister aux spectacles de Dieudonné. Peut-être un jour dira-t-on que le Sturmer et Mein Kampf sont tellement ridicules qu'ils servent à déconstruire les préjugés antisémites... Chacun d'entre nous sait que dans le monde qui est le nôtre, cela s'appelle au mieux prendre des vessies pour des lanternes.
Je me souviens avec émotion d'un spectacle de 1961 où par la magie d'un acteur génial, Daniel Sorano, et d'un texte également ambigu et génial, celui de Shakespeare, le Shylock du Marchand de Venise prenait une extraordinaire densité et devenait notre frère en humanité. Tout m'indique que le spectacle de La Rochelle était fort loin de ce niveau et se contentait de rire sur les préjugés habituels.
Cela est tout simplement honteux. Que des universitaires ne veuillent pas le comprendre, ou pire encore, aient peur de s'y opposer, témoigne de l'état de déliquescence intellectuelle auquel certains, adeptes du "on peut tout dire et toutes les opinions sont intéressantes" risquent de mettre la jeunesse de notre pays.
Je témoigne mon soutien total à M. Michel Goldberg et à ceux qui ne veulent pas fermer les yeux.
Richard Prasquier
Président du CRIF