Yonathan Arfi

Le nouveau Président du Crif, un militant juif et citoyen

Discours du Président du Crif lors de la commémoration du 81ème anniversaire du soulèvement du ghetto de Varsovie

22 Avril 2024 | 136 vue(s)
Catégorie(s) :
Antisémitisme

Dimanche 11 septembre 2016, j'étais l'invité de l'émission "30 minutes pour convaincre".

Dans la newsletter du CRIF du 5 septembre 2016, nous reproduisions une information  faisant état de la publication d’un rapport, publié le 1er septembre 2016 et préparé par l'Association Voices for Human Rights et l'Institut Touro (Touro Institute on Human Rights and the Holocaust).

Vouloir profiter de l'actuelle polémique pour assimiler les arrêtés anti-burkini à la Saint-Barthélemy et à la Shoah, c'est tomber dans l'indigne et le nauséabond 

J'ai recueilli pour la newsletter du Crif les réponses aux questions posées à cet homme qui, pris dans le tourment de l’histoire-celle avec sa grande hache dont parlait Perec- est resté libre jusqu’au bout des ongles

Retour sur le déchaînement de haines antisémites qui s’est produit l’été 2014, en France.

I was interviewed in English and French, on EJP , Tuesday, May 31, 2016.

J'ai été interviewé, en anglais et en français, sur EJP, mardi 31 mai 2016.

Suite à mon élection à la Présidence du Crif, j'ai répondu aux questions de Paul Amar, sur tous les sujets de préoccupations des Juifs de France.

J'ai été interviewé par Marc-Olivier Fogiel et Eléanor Douet, sur RTL, lundi 30 mai 2016, à la suite de mon élection à la Présidence du Crif.

Prix Nobel de littérature en 2002, l'écrivain hongrois Imre Kertèsz est mort à Budapest le 31 mars 2016. Son dernier livre, "L'ultime auberge" a reçu, le 22 mai 2016, le Prix Spécial du Jury 2016 du Salon du Livre de la Licra-Paris

A l'occasion de l'assemblée générale du Crif réunie le 29 mai 2016, j'ai prononcé mon discours de candidature.

Portrait de Jean Pierre Allali
LECTURES
|
24 Mai 2016
Catégorie : France, Antisémitisme

Malka Marcovich et Jean-Marie Dubois publient un ouvrage original sur un thème peu exploré jusqu'ici:la contribution de la société des transports parisiens à l'organisation de la déportation des Juifs de France aux heures sombres de l'Occupation nazie

Lors du 9ème Salon du Livre de la Licra, deux écrivains ont reçu un prix

Là-bas, la crainte d'une menace russe est la principale raison qui exacerbe les passions identitaires.

 
Lors d’une allocution devant le Conseil de sécurité, Rafael Ramirez, représentant du Venezuela auprès des Nations-Unies, a lancé… « Qu’est-ce qu’Israël a l’intention de faire avec les Palestiniens ? Vont-ils disparaître ? Est-ce qu’Israël cherche à imposer une Solution finale sur les Palestiniens ? » 
 

Décryptage.

 

Pages

Jeudi 18 novembre 2024, le Président du Crif a prononcé un discours à l’occasion de la commémoration du 81ème anniversaire du soulèvement du ghetto de Varsovie au Mémorial de la Shoah. 

 

 

« Madame l’ambassadrice,

Mesdames et messieurs les rescapés et témoins,

Mesdames et messieurs les élus,

Monsieur le Président du Mémorial de la Shoah,

Monsieur le Président du FSJU,

Monsieur le Président du Consistoire Central,

Chers amis,

Qu’est-ce que résister ? Chaque année, en venant ici commémorer le soulèvement du ghetto de Varsovie, je suis traversé par la même interrogation. Qu’est-ce que ce verbe, « résister », convoqué désormais à tort et à travers dans le débat public, pouvait-il bien vouloir dire, sous l’Occupation nazie, en Pologne et partout ailleurs en Europe ?

En France, Vladimir Jankélévitch avait été, pendant l'Occupation, l'un des dirigeants de la section toulousaine d’une organisation de résistance, le Mouvement national contre le racisme. « Résister, [affirmait-il alors], c’est renouer avec son judaïsme, lui donner un sens et une éthique car la morale qui refuse et s’insurge est un rempart invisible contre le mal ».

Jacques Lazarus, cadre du mouvement « L’Armée juive » voulait, lui, affirmer le sens d’une résistance spécifiquement juive : « Traqués en tant que Juifs, nous voulions montrer à l’ennemi que c’était aussi en tant que Juifs que nous combattions ». 

S’interroger sur le sens de la résistance juive au nazisme, c’est d’abord se replonger dans les sociétés juives d’avant-guerre. En Pologne, ainsi, 10 % de la population est juive. Cette communauté de plus de trois millions d’âmes est alors la plus importante d’Europe. La vie culturelle juive y est éclatante. Littérature, théâtre, presse… participent au rayonnement de la vie juive, de toutes les vies juives, aux côtés des synagogues et yeshivot. Jusqu’à ce que tout bascule.

Car dès 1940, débute l’enfer des ghettos.

À Varsovie, sur 8 % de la superficie de la ville, sont contraintes de s’entasser plus de 400 000 personnes, soit quasiment la population actuelle de la ville de Toulouse. À l’intérieur du ghetto, la famine ronge et entraîne avec elle misère physiologique et psychique.

Le Professeur Chaim Kaplan y tient scrupuleusement son journal. Le 17 novembre 1940, il écrit  « Ce que nous craignions le plus nous est arrivé. Nous avions quelque prémonition qu’une vie dans le ghetto nous attendait, une vie de peine et de pauvreté, de honte et de dégradation, mais personne n’avait prévu que cette heure fatale arriverait si vite ». 

La dernière adresse de Chaim Kaplan à son journal est datée du 4 août 1942. Ce jour-là, il écrit deux fois, le matin et le soir. Lisons ses derniers mots : « À 4 heures de l’après-midi, le quota était atteint : 13 000 personnes avaient été arrêtées et envoyées au point de rassemblement, parmi lesquelles 5 000 s’y étaient rendues de leur propre gré. Ils en avaient assez de la vie du ghetto qui est une vie de faim et de crainte de la mort. Ils sont sortis du piège. Si seulement je pouvais me permettre de faire comme eux ! Si je meurs, qu’adviendra-t-il de mon journal ? » Il mourra assassiné à Treblinka. Son journal parviendra à lui survivre.

Quelques mois plus tard, à partir du 19 avril 1943, les combattants du ghetto choisiront : une autre résistance, la résistance armée, et feront face durant 27 jours aux assauts de l’armée allemande. On le sait, cette lutte héroïque et tragique du ghetto de Varsovie suscita l’admiration en Pologne et bien-au-delà.

Dans le ghetto de Bialystok par exemple sous le commandement de Mordechaï Tenenbaum et Daniel Moszkowicz la révolte éclate le 16 août 1943 mais durera moins longtemps que celle du ghetto de Varsovie. Une autre révolte a eu lieu quelques jours auparavant, le 2 août 1943, celle des sonderkommandos de Treblinka. Ceux de Sobibor, à leur tour se soulèvent le 14 octobre 1943, contribuant à faire symboliquement de cette année 1943 celle des résistances juives.

Fait souvent méconnu, en Belgique, ce même 19 avril 1943, le convoi quittant le camp de Malines pour déporter à Auschwitz les 1 631 Juifs qui le composent fit l’objet d’une action menée par trois résistants, Youra Livchitz, Robert Maistriau et Jean Franklemon en vue d’en libérer les passagers. 236 d’entre eux sautent du train. La concomitance des dates entre cette attaque et le début de la révolte du ghetto de Varsovie est un hasard. Cependant, la constante de l’année 1943 est qu’il n’y a plus aucun doute sur le sort que les nazis réservent aux Juifs.

À propos de la révolte du ghetto de Varsovie et de son retentissement sur la résistance juive en France, Adam Rayski, qui fut l’un des fondateurs du Crif il y a maintenant 80 ans soulignait l’écho du soulèvement : « Logiquement » — écrivait-il —, « notre réflexion sur la portée historique du soulèvement nous a conduit à s’interroger à nouveau, comme ce fut le cas à chaque moment grave de l’histoire juive, sur le choix des armes pouvant garantir la pérennité du judaïsme. C’est la résurgence du fameux dilemme presque deux fois millénaire, à savoir : devons-nous combattre par l’esprit ou par l’épée ? »

Il ajoutait « Le combat héroïque et désespéré des derniers survivants de Varsovie avait montré combien paraissaient périmées les divergences politiques face à un ennemi qui frappait sans discernement tous les Juifs ». 

Cette révolte, pour la situer dans l’histoire juive, se rattachait à une tradition, à un courant qui semblaient appartenir définitivement à un passé très lointain : la tradition de la résistance armée. Avec le soulèvement du ghetto de Varsovie, remontent la mémoire de Massada et la révolte de Bar Kochba : le combat se fait désormais par l’esprit ET par l’épée.

Chers amis, je n’aime pas les comparaisons historiques par définition toujours approximatives. Mais le passé nous invite cependant toujours à regarder le présent avec des yeux lucides et dénués de toute naïveté. 

La période que nous traversons nous interroge sur la manière de résister aux accusations qui assaillent aujourd’hui, au-delà du seul État d’Israël, les Juifs du monde entier. Dans une pernicieuse inversion accusatoire, l’État juif est accusé de génocide et le Hamas se présente comme un mouvement de résistance. Depuis le 7 octobre, les Juifs, partout, au lieu de rencontrer un élan de solidarité, font face à une déferlante inédite d’actes antisémites mais aussi à une violente assignation à répondre de la situation au Proche-Orient.

Face à cela, il est aujourd’hui de notre responsabilité à tous de cultiver l’esprit de résistance dont nous sommes héritiers. Non pas l’insoumission dont certains agitateurs se revendiquent, mais bien la résistance des valeurs de justice et d’émancipation qui fondent notre pacte républicain et sont au cœur de l’Histoire juive.

Dans le merveilleux roman de Stefan Zweig La confusion des sentiments on lit que « La jeunesse a toujours raison. Qui l’écoute est sage ». Je remercie sincèrement les jeunes de l’Hashomer Hatsaïr et les élèves de Yabné d’être parmi nous aujourd’hui et de participer activement à cette commémoration.

Si les générations qui se succèdent se relaient pour perpétuer la Mémoire, alors nous aussi aurons à notre manière « résisté » et rendu le seul et véritable hommage qui vaille à celles et ceux qui ont donné leur vie pour que nous vivions libres.

Je vous remercie. »

 

Yonathan Arfi, Président du Crif