Richard Prasquier

Ancien Président du CRIF

Blog du Crif - Le patriotisme aujourd’hui

15 Juillet 2021 | 54 vue(s)
Catégorie(s) :
Opinion

Vouloir profiter de l'actuelle polémique pour assimiler les arrêtés anti-burkini à la Saint-Barthélemy et à la Shoah, c'est tomber dans l'indigne et le nauséabond 

A l'occasion de l'assemblée générale du Crif réunie le 29 mai 2016, j'ai prononcé mon discours de candidature.

Depuis des années, l’historien Marc Knobel a de salutaires obsessions et une puissante détermination. L’une de ses salutaires obsessions, sur laquelle il a beaucoup travaillé et mené de profondes recherches, est cette diffusion sans frontières, sans retenues et sans toujours grandes oppositions, des haines multi-formes qui s’entretiennent.

Pour comprendre cet accord entre l’Iran et les grandes puissances sous la direction stratégique des USA, il faut essayer de comprendre la nouvelle politique internationale de l’administration américaine

Eté 2014. Pendant 1 mois et 18 jours, Israël a vécu au rythme des alertes et d’une guerre qui ne dit pas son nom. Un an plus tard. Juillet 2015 : Que reste-t-il de ces jours d’angoisse ?

Le 23 juin dernier, l’Union des étudiants juifs de France a célébré son 70e anniversaire à l’Hôtel de Ville de Paris. Magie des réseaux sociaux, j’ai vécu à distance cette soirée avec enthousiasme et frustration. L’occasion pour moi de replonger dans mes années Uejf.

Comme chaque été, de nombreux juifs ont décidé de quitter la France pour s’installer en Israël. On parle de 8000 à 10 000 pour l’ensemble de l’année 2015. J’ai moi-même fait ce choix en 2013  et pourtant j’ai, plus que jamais, envie de parler de ceux qui restent. 

Dov Maimon rejoint les auteurs du Blog du Crif !

Ce dernier détaille ici les multiples racines de l’antisémitisme, qui a explosé en France à partir de l’année 2000 et la première « intifada ». Et qui s’est fortement aggravé tout au long de l’année dernière. Marc Knobel évoque notamment l’origine idéologique – soulignée et étudiée par le philosophe et chercheur Pierre-André Tagguief – d’un antisémitisme qui découle d’un antisionisme extrême, lui-même alimenté depuis longtemps par les tenants de l’islamisme radical. Extrême gauche et extrême droite française en passant par « Dieudonné and Co » sont aussi, historiquement et actuellement, parmi les premiers diffuseurs de la haine antisémite en France. Description et analyse en huit points.

Partout en France, des crayons, des stylos et des feutres ont été brandis, les seules armes du courage et de la liberté contre d'autres armes qui tuent, qui souillent, qui meurtrissent à tout jamais.

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14 juillet 1789. Le roi Louis XVI était rentré bredouille de la chasse et avait écrit « rien » sur son journal intime. A Paris la foule avait donné l’assaut à la vieille  citadelle de la Bastille, avait promené la tête du gouverneur au bout d’une pique et libéré en grande pompe les prisonniers: quatre faux-monnayeurs, un noble incestueux et deux malades mentaux. Cette  journée, une des plus célèbres de l’histoire du monde, fut suivie d’une avalanche de « fake news » comme on dirait aujourd’hui, pour décrire l’horreur d’une prison où, certes, les prisonniers étaient entrés  par l’arbitraire d’une lettre de cachet, mais qui était quasiment vide et bien moins terrible que d’autres.

Les historiens pensent que le choix du 14 juillet comme Journée Nationale, qui date de 1880,  s’arrimait plutôt à la fête de la Fédération du 14 juillet 1790, le moment le plus pacifique de la Révolution, mais la mémoire populaire privilégie les épisodes plus corsés et la prise de la Bastille a plus de panache qu’une cérémonie festive dont le consensus, s’est d’ailleurs révélé une très transitoire illusion. Et nous commémorons donc la journée mythique du 14 juillet 1789 où le peuple a conquis sa liberté.

C’est la journée du patriotisme. Mais qu’est-ce que le patriotisme aujourd’hui?

Qu’est-il devenu dans notre France privilégiée à l’abri de la guerre, en ces temps  de défis climatiques planétaires, de mondialisation des échanges, de faiblesse européenne et de déconstruction de l’histoire? Certains pensent que minimiser les antagonismes et faire confiance en la volonté de paix des peuples permet de ranger la patrie au rang des accessoires obsolètes et dangereux.

Je crois qu’ils ont tort.

Le patriotisme, écrit  François Xavier Bellamy, homme de droite, ce n’est pas d’affirmer la supériorité de son héritage sur celui des autres, mais se baser sur cet héritage pour comprendre le monde. Sa définition fait écho à celle de Renan qui écrivait que la nation était un principe spirituel, mais aussi à Romain Gary, pour qui le patriotisme c’est l’amour des siens, alors que le nationalisme, c’est la haine des autres.

Certes… mais cela suffit-il ?

Pour éviter les dérives nationalistes le philosophe allemand Jurgen Habermas  a proposé que le ciment collectif se fonde sur un « patriotisme constitutionnel » où le citoyen s’identifie à l’Etat démocratique plutôt qu’à la nation. Il avait bien sûr en tête l’histoire de son pays où Ein Reich, Ein Volk conduisait à Ein Fuhrer. Le même principe constitutionnel a été adopté dans la charte canadienne avec l’idée que le patriotisme se superposerait ainsi harmonieusement au nationalisme québécois comme une matriochka englobe des poupées russes plus petites.

Encore faut-il qu’ on donne de la substance à la poupée englobante et qu’on ne lâche pas la bride à un multiculturalisme dans lequel tout se vaut. Le patriotisme d’aujourd’hui doit naviguer entre les deux écueils du nationalisme et du relativisme. En France, l’affirmation de  la laïcité et celle de la démocratie en sont les piliers sur lesquels on ne peut transiger. La défense de ces piliers repose sur l’armée à l’extérieur, la police à l’intérieur. Nous en avons besoin car ce patriotisme a des ennemis.

L’échec de l’opération Barkhane, concomitant au retrait américain de l’Afghanistan, soulève étonnamment  peu d’émotion, alors qu’il présage une reconfiguration géopolitique lourde de conséquences.

L’islamisme radical et les autocraties nationalistes, Chine, Russie, Iran, Turquie et d’autres, ont le vent en poupe alors que les citoyens des démocraties semblent partagés entre déni, résignation et tentation d’un nationalisme sans honneur et sans espoir.

Patriotisme et démocratie autorisent seuls l’attelage difficile de la transmission et de l’altérité. Les Juifs ont  toujours été au premier rang de cette recherche et Israël est un fer de lance de ce combat dans le monde. Rien n ‘est plus naturel que le lien entre l’attachement des Juifs envers Israël et leur patriotisme pour la France démocratique et laïque.

Mais il faut que la France reste bien laïque et démocratique…

Richard Prasquier

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