Virginie Guedj-Bellaïche

Journaliste-Blogueuse

Le dialogue renoué

29 Juillet 2015 | 1538 vue(s)
Catégorie(s) :
France

"The strength of a Nation always lies in the the way it looks at its History and and its ability to teach it to future generations".

 

"La force d’une Nation réside toujours dans le regard qu’elle sait porter sur son histoire et sa capacité à l’enseigner aux générations suivantes."

 

En juin 2017, quelques mois après l'assassinat de Sarah Halimi, Francis Kalifat, Président du Crif, publiait cette tribune en hommage à Sarah Halimi, devenue le triste symbole de l'antisémitisme qui tue. 

Sarah Halimi, une retraitée a été battue à mort à Paris, le 4 avril 2017 et son calvaire a duré plus d'une heure. Et, il s'agit bien d'un meurtre antisémite.

Thierry Noël-Guitelman est un journaliste, membre de l'association Hébraïca à Toulouse. Il a engagé, en 2004, des recherches familiales sur l'étoile jaune, sa tante Ida Seurat-Guitelman, ayant obtenu une exemption.

Portrait de Gil Taïeb
Nous sommes debout
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03 Avril 2017
Catégorie : France, Actualité, Opinion

Samedi 1er avril place du Châtelet se sont réunies une centaine de membres du Collectif Boycott Israël

Francis Kalifat, the Crif President gave a speech at the annual Crif's dinner 2017. 

Né à Tunis en 1920, Albert Memmi, s’il a été considéré, à travers certains de ses romans, comme le chantre du judaïsme tunisien, demeure surtout, le théoricien du colonialisme

C’est l’histoire d’un mariage mixte raté. Un mariage entre une Juive et un Musulman, Julie et Sam. 

"Le terrorisme et l'antisémitisme ont marqué cette année passée"

Pages

Mars 2015, je suis à Bruxelles pour présenter mon livre écrit sous le pseudo de Sefwoman, « Je suis juive mais je me soigne ». Au fond de la salle, 3 garçons se marrent. Je parle de ma grand-mère et de service 98 pièces au liseré doré, de son refus de me parler de l’Algérie, des plats typiques, je les vois acquiescer. A la fin de la présentation, ils ont tous les trois le livre en main. « La dédicace c’est pour qui ? », « Ismaël ».

Du plus loin que je me souvienne, il y a toujours eu des musulmans dans mon entourage. Ils étaient dans les conversations de mes grands-parents. Ils étaient nos voisins, nos commerçants, mes collègues à la Smerep, mes binômes en TD, mes voisins de bibliothèque. Moi juive, eux musulmans. Tous assumés conscients d’appartenir à deux mondes différents mais parfois si proches. Lors de nos diners, annuel, je revois M. parents nés au Maroc, père agent d’entretien, aujourd’hui Trader à Londres après 2 ans d’envoi de CV infructueux, nous imiter sa grand-mère qui a toujours vécu avec eux. Ses intonations, ses anecdotes résonnaient comme un lointain écho à mon histoire, ma famille. En 2000, tout bascule. L’équilibre fragile, la cordialité bienveillante  voire l'indifférence se fissurent. Fin octobre, je suis à un diner. M, est là. Il ne parle que de ce que tout le monde appelle la deuxième Intifada. Je l’écoute gloser sur la visite d’Ariel Sharon sur le mont du Temple. Je tente de répondre. je parle des attentats-suicide, il me répond résistance. La conversation est vive. Il me regarde et me lance pointant son doigt vers moi « vous les juifs ».

On se dit qu’on ne se sépare pas « fâché » mais je le sais ce sera, avec eux, mon dernier dîner

Le reste de la tablée  ne sort de sa léthargie que pour se lamenter sur les images à la télé du petit Mohamed Al-Dura. Pour la première fois de ma vie, au milieu d’eux, je me demande ce que je fous là. On se dit qu’on ne se sépare pas « fâché » mais je le sais ce sera, avec eux, mon dernier diner.  J’ai revu M, à l’aéroport Charles-de-Gaulle, nous sommes en novembre 2001, Je m’envole pour New-York, défiguré un mois plus tôt, lui attend un vol pour Punta Cana. Quand on remet nos chaussures après la douane, il se plaint des multiples contrôles. Je lui réponds « la faute à qui ». Il baisse la tête, je sais que c'est facile mais je me dis qu’on est quitte. Depuis 2000, j’ai la sensation que le conflit israélo-palestinien  - qui date de plus d’un demi-siècle - a empêché toutes tentatives de discussions avec les musulmans que j’ai croisés. Comme si finalement, plus rien ne pouvait nous rassembler et que nos échanges ne pouvaient se faire que  sur le mode de l’affrontement verbal. J’en étais resté à ce constat d’échec quand Ismaël Saïdi m’a tendu un soir de mars 2015 mon livre en me disant « Pour Ismaël », nous avons parlé, beaucoup. De la radicalisation, de l’antisémitisme, de l’abandon des politiques, de la vie dans ce qu’on appelle les quartiers, de l’inculture terreau de la radicalisation, des frères Kouachi, de l’attentat contre l’Hyper Casher, de Latifah Ibn Ziaten, la maman d’Imad.

Le conflit israélo-palestinien, épicentre de l’empathie et de la solidarité internationale

Ismaël Saïdi a monté une pièce. Tragi-comique, « DJIHAD » raconte l’histoire de Ben, Reda et Ismaël, trois bruxellois qui décident de partir faire le jihad en Syrie. La pièce  tourne partout en Belgique mais aussi dans le Nord de la France. Des classes entières viennent les voir. Quand le rideau  tombe sur une fin tragique pour les 3 jeunes apprentis jihadistes, les trois comédiens quittent leurs personnages pour échanger avec les jeunes  partagés pendant plus d’une heure entre rire et effroi. Souvent l’échange se cristallise autour du conflit israélo-palestinien, épicentre de l’empathie et de la solidarité internationale mais Ismaël et ses deux acolytes tiennent bon. Un vendredi, quelques heures avant chabbath, le rabbin de Bruxelles a assisté à la pièce. Ses paroles d’apaisement ont été acclamées par une salle pourtant hostile quelques minutes auparavant. En lui dédicaçant mon livre (la dédicace la plus pourrie de ma jeune carrière d’auteur nous en convenons tous les deux), j’ai renoué ce dialogue interrompu quinze ans plus tôt.  En rentrant en Israël, j’ai suivi les exploits de la troupe, lu toutes leurs interviews, liké leurs statuts Facebook. Certains y verront de ma part de l’angélisme mais, j’assume. J’ai assez de  lucidité pour savoir que nous ne sommes sans doute pas d’accord sur tout mais j’ai la naïveté de croire que le maintien d’un dialogue est possible. Et plus que tout, j’ai la conviction qu’historiquement, culturellement et cultuellement, j’aurais toujours plus d’affinités avec Ismaël Saïdi qu’avec François Berton, dont la famille est installée en Lozère depuis 8 générations. Et puis Ismaël, n’est –il pas le fils d’Abraham  ?