Par Robert Ejnes, Directeur de la rédaction, Directeur exécutif du Crif
Le Premier Ministre Manuel Valls en a surpris plus d'un au Diner du Crif lorsqu'à l'unisson avec le Président du Crif Roger Cukierman, il n'a pas hésité à affirmer que "l'antisionisme c'est de l'antisémitisme". En citant le philosophe Vladimir Jankélévitch dans son discours, Manuel Valls nous a donné une clé de compréhension.
En effet, dans un tout petit livre "L'Imprescriptible", en 1971, quatre ans avant la mention infamante "sionisme = racisme" votée par l'ONU, 35 ans avant la création de BDS, le philosophe, nous livrait les clés de lecture de l'antisionisme.
Analysant les conséquences de la Shoah, Jankélévitch osait : "l’«antisionisme» est... une introuvable aubaine, car il nous donne la permission et même le droit et même le devoir d’être antisémite au nom de la démocratie ! L’antisionisme est l’antisémitisme justifié, mis enfin à la portée de tous. Il est la permission d’être démocratiquement antisémite. Et si les Juifs étaient eux-mêmes des nazis ? Ce serait merveilleux. II ne serait plus nécessaire de les plaindre ; ils auraient mérité leur sort, C’est ainsi que nos contemporains se déchargent de leur souci."
Ce petit livre vieux de 45 ans, comme le "Plaidoyer pour ma terre" de Pagani, de 1975, porte une prédiction qui se révèle si vraie aujourd'hui.
On entend ici et là les critiques sur la "confusion" de Manuel Valls.
Non, Manuel Valls ni Roger Cukierman n'ont rien confondu. Nous avions été prévenus, mais nous avons cru que les choses pouvaient s'améliorer, que la raison prendrait le pas sur les émotions.
Le monde n'a pas changé, Jankélévitch et Pagani avaient raison. Nous devrions les relire et les écouter plus souvent.