Richard Prasquier

Ancien Président du CRIF

Le billet de Richard Prasquier – Israël, derrière la guerre des armes, la guerre des mots

12 October 2023 | 282 vue(s)
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Opinion

Depuis plusieurs années, le cinéma international ne cesse de plébisciter les cinéastes iraniens. Asghar Farhadi en est l’exemple même. Cependant, certains réalisateurs n’ont pas la chance d’être autant ovationnés.

Pour leur cinéma engagé, frontal et dénonciateur du pouvoir politique et du régime iranien, grand nombre de réalisateurs iraniens ont été, pour les plus chanceux, contraint à l’exil, tandis que d’autres en détention, subissent le triste sort réservé aux prisonniers iraniens.

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Ce matin encore les membres de l’organisation Zaca continuent de collecter des restes humains. Pour ces hommes habitués à l’horreur des attentats, ce qu’ils voient est une abomination qui les marquera jusqu’à la fin de leurs jours. Et il en est de même de tout Israël, il en est de même ailleurs qu’en Israël chez des individus de toute religion ou toute opinion qui ont éprouvé un sentiment de dégoût. Celui ou celle qui ne l’éprouve pas, celui ou celle qui ergote sur les termes, celui ou celle qui tourne autour du pot, celui ou celle pour qui cet événement doit être « contextualisé » suivant un terme qui a beaucoup servi pour noyer la vérité, celui-là, il ou elle, a quitté notre civilisation. 

 

Il ne s’agit pas que de brutes ignares ou de fanatiques sanguinaires. Il y a là des professionnels hautement diplômés, ceux dont Rabelais a dit que science sans conscience n’est que ruine de l’âme. Il y a là ceux et celles qui prétendent défendre les victimes, mais qui sélectionnent les victimes qui les intéressent et transforment les autres en coupables, il y a là des étudiants d’institutions prestigieuses, comme ceux de Harvard, qui viennent de déshonorer leur université par un scandaleux communiqué.

 

Dans le monde politique, il n’y a pas que la France et son affligeant LFI, devenu la France indigne en même temps que la France islamiste, avec sa clique de porte flingues de la garde rapprochée de Jean-Luc Mélenchon, ce caudillo apprenti0. Celui-ci a tellement fantasmé sur le Président Chavez qu’il a fait sien l’antisémitisme du leader vénézuélien. Il n’y a pas que ces organes de presse parisiens qui répugnent non seulement à parler de terrorisme islamiste, mais de terrorisme tout court du moment qu’il est perpétré par une organisation islamique. Le grand rabbin d’Angleterre a pointé la BBC, laquelle s’était régalée de l’opinion d’un expert qui avait comparé l’action du Hamas à celle des héros du ghetto de Varsovie.

 

Il n’y a pas de limite dans la barbarie, pourquoi y en aurait-il une dans le mensonge ? On répète comme une ritournelle la phrase de Camus « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde. » Camus en réalité ne pensait pas à la politique, il réfléchissait au problème philosophico-linguistique du mot et de son rapport avec la réalité qu’il recouvre, mais appliquée à la propagande, cette phrase est d’une terrible actualité.  

 

Pour préciser ce qu’ont été les massacres commis par le Hamas, il faut se lancer dans une comptabilité un peu sordide.

 

Au festival de musique de Réïm, on compte déjà 300 personnes assassinées. Pour mémoire, il y a eu au Bataclan, auquel ce massacre fait beaucoup penser, 90 victimes. Nul n’avait eu alors des pudeurs de gazelle pour qualifier l’acte de terroriste, et personne, comme le fait remarquer le Président du Crif, Yonathan Arfi, n’avait alors demandé à la France de faire la paix avec Daech. 

 

Dans les villes de Sderot et Ofakim et surtout dans les kibboutzim, Nahal Oz, Beeri, Kfar Aza, il y a eu un nombre encore indéterminé de centaines de victimes. Pour rappel à ceux qui pourraient l’ignorer, ces kibboutzim sont à l’intérieur des frontières de 1967. Il y avait à Beeri plusieurs militants de B’tselem, une organisation critiquée par beaucoup d’Israéliens, pas seulement ceux de droite, tellement elle allait loin dans sa défense des Palestiniens. Beeri, dont le Hamas connaissait parfaitement l’orientation, est peut-être le lieu du pire des massacres. Simplement parce qu’ils étaient Juifs…

 

En France, à Oradour-sur-Glane, la division blindée SS « Das Reich » avait assassiné 650 personnes. Les chiffres toujours provisoires des massacres par le Hamas sont de plus de 1 200 morts… On estime qu’au cours des attentats du 11 septembre 2001, le nombre de tués est 2,5 fois plus élevé, environ 3 000 personnes. Mais les États-Unis sont 35 fois plus peuplés qu’Israël.

 

Ce qui s’est passé n’est pas non plus un pogrome car, même quand les autorités laissaient faire et parfois incitaient aux meurtres, les pogromes ont été effectués par des populations civiles, ou éventuellement des troupes irrégulières. Ici, il s’agit des troupes d’élite du Hamas, par exemple les brigades Izz al-Din al-Qassam. 

 

Ils ne portaient pas d’habits militaires, ce qui permet de faire croire qu’il s’agit de la révolte spontanée d’un peuple exaspéré. Il ne s’agit évidemment pas non plus, contrairement à ce que prétend Madame Panot, de la simple branche militaire du Hamas qui serait autonome, alors que le mouvement serait, lui, parfaitement respectable. Croire cela est d’une imbécillité sans nom.

 

Il ne s’agit donc pas d’un raptus de colère, mais d’un comportement prémédité et valorisé. La comparaison qui s’impose est celle des nazis, SS ou nazis islamistes de Daech. Certains nazis hitlériens auraient peut-être, si la technologie avait existé, effectué des selfies pour se glorifier de leurs exploits, mais la règle par rapport à la population civile allemande était la discrétion. Ici, les scènes les plus horribles servent de teasing publicitaire pour stimuler des admirateurs et embraser de fierté et de joie des populations entières. C’est là une rupture anthropologique majeure. 

 

Il faut le rappeler autour de nous : cette guerre concerne tous ceux qui font cas de la morale de la Bible et de l’enseignement des Lumières. Les Israéliens luttent aussi pour nos valeurs et nos démocraties.

 

Les abominations font déjà partie d’un passé que certains oublieront très vite pour reprendre un discours de paix aujourd’hui vide de sens. Au fur et à mesure que progressera la guerre des armes avec son cortège de drames humains, la guerre des mots s’intensifiera. Ce sera aux dépens d’Israël, comme si ce pays avait le choix, comme si la guerre contre Hitler aurait pu être gagnée en continuant les comportements de Munich et sans faire souffrir aussi des populations civiles.

 

Les éléments de langage sont connus : le double standard des Occidentaux, la vie d’un enfant palestinien vaut la vie d’un enfant Israélien, les crimes de guerre ont été commis des deux côtés… Ces allégations sont vicieuses et il faut savoir y répondre.

 

Car ils seront de plus en plus nombreux ceux que Churchill appelait les « appeasers », les « apaiseurs ». « An appeaser is one who feeds a crocodile, hoping it will eat him last ». Un « apaiseur », c’est celui qui nourrit un crocodile, espérant qu’ainsi, il sera le dernier à être mangé…

 

Richard Prasquier, Président d’honneur du Crif

 

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