Blog du Crif - "Retour à Birkenau" : Un témoignage qui en appelle aux sens

06 June 2019 | 66 vue(s)
Catégorie(s) :
Opinion

Vouloir profiter de l'actuelle polémique pour assimiler les arrêtés anti-burkini à la Saint-Barthélemy et à la Shoah, c'est tomber dans l'indigne et le nauséabond 

A l'occasion de l'assemblée générale du Crif réunie le 29 mai 2016, j'ai prononcé mon discours de candidature.

Depuis des années, l’historien Marc Knobel a de salutaires obsessions et une puissante détermination. L’une de ses salutaires obsessions, sur laquelle il a beaucoup travaillé et mené de profondes recherches, est cette diffusion sans frontières, sans retenues et sans toujours grandes oppositions, des haines multi-formes qui s’entretiennent.

Pour comprendre cet accord entre l’Iran et les grandes puissances sous la direction stratégique des USA, il faut essayer de comprendre la nouvelle politique internationale de l’administration américaine

Eté 2014. Pendant 1 mois et 18 jours, Israël a vécu au rythme des alertes et d’une guerre qui ne dit pas son nom. Un an plus tard. Juillet 2015 : Que reste-t-il de ces jours d’angoisse ?

Le 23 juin dernier, l’Union des étudiants juifs de France a célébré son 70e anniversaire à l’Hôtel de Ville de Paris. Magie des réseaux sociaux, j’ai vécu à distance cette soirée avec enthousiasme et frustration. L’occasion pour moi de replonger dans mes années Uejf.

Comme chaque été, de nombreux juifs ont décidé de quitter la France pour s’installer en Israël. On parle de 8000 à 10 000 pour l’ensemble de l’année 2015. J’ai moi-même fait ce choix en 2013  et pourtant j’ai, plus que jamais, envie de parler de ceux qui restent. 

Dov Maimon rejoint les auteurs du Blog du Crif !

Ce dernier détaille ici les multiples racines de l’antisémitisme, qui a explosé en France à partir de l’année 2000 et la première « intifada ». Et qui s’est fortement aggravé tout au long de l’année dernière. Marc Knobel évoque notamment l’origine idéologique – soulignée et étudiée par le philosophe et chercheur Pierre-André Tagguief – d’un antisémitisme qui découle d’un antisionisme extrême, lui-même alimenté depuis longtemps par les tenants de l’islamisme radical. Extrême gauche et extrême droite française en passant par « Dieudonné and Co » sont aussi, historiquement et actuellement, parmi les premiers diffuseurs de la haine antisémite en France. Description et analyse en huit points.

Partout en France, des crayons, des stylos et des feutres ont été brandis, les seules armes du courage et de la liberté contre d'autres armes qui tuent, qui souillent, qui meurtrissent à tout jamais.

Pages

Découvrez ma lecture du livre de Ginette Kolinka, "Retour à Birkenau".

Ginette Kolinka, une jeune fille juive française, est arrêtée en 1944 avec son père, son petit frère et son neveu. Tous sont déportés à Birkenau, mais elle seule en reviendra. Survivante de la Shoah, elle témoigne aujourd’hui dans toutes les classes de France.

Dans son livre, écrit avec Marion Ruggieri, Ginette Kolinka raconte son histoire de la même manière qu’elle témoigne dans ces classes.

À travers ses propres mots, des mots simples, ceux qu’elle utilise pour s’exprimer à l’oral, Ginette Kolinka nous apparaît. Elle est là, face à nous et raconte. Elle nous transporte à une autre époque, un peu lointaine, et pourtant toujours si présente dans son esprit. À tel point que ses souvenirs sont encore emprunts de sensations.

« Je vois, je sens » explique Ginette.

« Mais vous, qu’est-ce que vous voyez ? » demande-t-elle.

La même chose, ai-je envie de répondre… Car on ne lit pas vraiment. On l’entend nous raconter, on la voit nous montrer.

Ce témoignage fait appel à tous nos sens :

L’ouïe. Schnell ! Schnell ! entend-on raisonner. Auftstehen ! Tout au long de la lecture, la voix de Ginette est entrecoupée de cris. Schlag ! Schlag ! Sans arrêts, les cris des soldats allemands nous parviennent, d’autant plus réels qu’ils sont directement retranscrits dans leur langue d’origine.

L’odorat. L’odeur de l’urine, des excréments dans ces toilettes qui n’en sont pas. Je repense à cette puanteur et mon nez se plisse, rien qu’à l’imaginer. L’odeur de la saleté, de la terre. Et l’odeur de la fumée qui parvient jusqu’au bloc 27…

Le toucher. Lorsqu’on imagine ces centaines de corps qui s’entassent et se pressent à l'intérieur du wagon. Lorsque ces femmes redécouvrent leurs corps, rasés, nus, sales, abîmés, amaigris, malades, privés de chair… Et sous les coups. Ces coups incessants. Tout le temps. Tellement. Qu’ils finissent par ne plus les sentir.

Le goût. Voilà peut-être ce qui manque : le goût. La nourriture, insuffisante, n’a ni consistance ni saveur. Des petites écuelles de soupe et de café à se partager, du morceau pain qui doit durer quatre jours, ce qui marque, de façon plus significative encore, c’est l’absence de goût : la Faim ! Cette faim qui ronge, affaiblit et précipite à petit feu vers la mort.

La vue. Ce témoignage c’est tout d’abord celui du noir : dans le train, la nuit dans le camp, de la mort. Et symboliquement, du brouillard, des interrogations, de l’ignorance. Ne pas savoir, ne pas comprendre, ne pas penser, ni réfléchir sont autant de mécanismes de défense pour survivre. C’est l’instinct qui prend le dessus, comme lorsqu’elle prend le train (par hasard et par chance) en direction de Bergen-Belsen.

Désormais il n’y a plus rien à voir … ou presque.

Elle-même ne reconnaît plus grand-chose : « Birkenau, sur place, c’est un décor. Quelqu’un qui n’en connaît pas l’histoire peut ne rien voir. »

Alors, les derniers témoins disparaissant, plus que jamais elle continue de raconter, de transmettre, avec la détermination qui lui a autrefois sauvé la vie.

Ginette Kolinka est une passeuse de mémoire, « pour qu’on n’oublie jamais… »

Johana M.

 

À lire aussi :