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Publié le 8 Octobre 2020

Monde - L’autrice américaine Ruth Klüger, survivante de la Shoah, est morte

Elle avait reçu de nombreux prix littéraires, dont le prix Mémoire de la Shoah en 1998, ainsi qu’en 2011 le prix autrichien Theodor Kramer, qui récompense des écrivains en résistance ou en exil.

Publié le 7 octobre dans Le Monde

L’autrice américaine d’origine autrichienne Ruth Klüger, survivante de la Shoah, est morte à l’âge de 88 ans en Californie, a-t-on appris, mercredi 7 octobre, auprès de sa maison d’édition viennoise. « Il est rare de rencontrer une personne avec autant de magnétisme », a dit son éditeur, Zsolnay, lui rendant hommage dans un communiqué.

Née en octobre 1931 à Vienne dans une famille juive, Ruth Klüger avait été déportée alors qu’elle n’avait pas 11 ans au camp de concentration de Theresienstadt, dans le protectorat de Bohême-Moravie dépendant de l’Allemagne nazie, aujourd’hui Terezin, en République tchèque. A 14 ans, elle rejoint Auschwitz, en Pologne, avant d’être envoyée dans un autre camp, où elle est soumise au travail forcé. Immigrée aux Etats-Unis à l’âge de 15 ans, elle fera ses études à New York et à l’université de Berkeley, en Californie.

Devenue professeure, spécialiste de littérature germanique, elle se consacra d’abord à ses travaux de recherche, et ce n’est qu’après un grave accident de la route en Allemagne, dans les années 1980, qu’elle évoqua son expérience des camps.

« Une injustice qui ne pourra jamais être réparée »

Dix ans plus tard, l’universitaire publiait Refus de témoigner, où elle portait un regard critique sur le travail de mémoire. « La torture n’abandonne pas le torturé, jamais, de toute sa vie », écrivait-elle. A la presse autrichienne Ruth Klüger avait confié son « ressentiment pour une injustice qui ne pourra jamais être réparée ». « Ce n’est pas à nous, survivants, d’être responsables du pardon », disait-elle.

Dans un discours émouvant devant le Bundestag, à Berlin, elle avait salué en janvier 2016 la politique « héroïque » d’Angela Merkel de la main tendue aux réfugiés. « Ce pays qui, il y a quatre-vingts ans, fut responsable des crimes les plus atroces du siècle, a aujourd’hui gagné les applaudissements du monde entier grâce à l’ouverture de ses frontières et la générosité avec laquelle il a pris et prend encore en charge le flot de réfugiés syriens et d’autres nationalités », avait lancé l’intellectuelle.

Ruth Klüger avait reçu de nombreux prix littéraires, dont le prix Mémoire de la Shoah en 1998, ainsi qu’en 2011 le prix autrichien Theodor Kramer, qui récompense des écrivains en résistance ou en exil.