La semaine dernière, l’Université de Columbia (New York) a organisé son "Global Leaders Forum". Le Premier ministre malaisien Mahathir Bin Mohamad, tristement connu pour ses déclarations antisémites, figurait parmi les orateurs. Au cours de son discours, Romy Ronen, membre de l'association étudiante de Columbia, Students Supporting Israel (SSI), l'a interpellé pour lui demander de clarifier sa position. Nous avons demandé à SSI de nous en dire plus sur ce geste courageux.
Crif - La semaine dernière, l'une des membres de l'association étudiante Students Supporting Israel de l'Université de Columbia a interpellé le Premier ministre malaisien Mahathir Bin Mohamad pour son antisémitisme. Rappelez-nous quelles ont été les déclarations de Mahathir Bin Mohamad sur les Juifs et la Shoah.
Sudents Supporting Israel - Le Premier ministre Mahathir Bin Mohamad a déclaré qu'il était "fier d'être qualifié d'antisémite" sur son propre blog. Dans une interview donnée à la BBC, il avait également déclaré qu'il "ne pouvait pas vraiment dire que la Shoah avait fait six millions de victimes". En 1997, Mahathir Bin Mohamad a prononcé un discours affirmant que la crise économique en Malaisie était dû à un "programme juif" dirigé par un survivant de la Shoah et philanthrope George Soros.
Quel était le but de sa visite à l'Université de Columbia ?
Sa présence sur le campus était liée au Global Leaders Forum (Forum mondial des dirigeants), où des dirigeants du monde entier ont été invités à parler aux étudiants de Columbia, tels que la reine de Belgique. Romy Ronen, membre de SSI à Columbia, lui a demandé de clarifier sa position vis-à-vis de la Shoah.
Qu'a-t-il répondu après son interpellation et quel est votre réaction ?
Sa réponse a été : "J’exerce mon droit à la liberté d’expression. Pourquoi est-ce que je ne peux rien dire contre les Juifs alors que d’autres personnes peuvent dire ce qu'ils veulent sur moi ou sur la Malaisie. Je ne proteste pas contre ça. Vous devez être prêt à écouter les points de vue en raison de la liberté d'expression, même si ils vous mettent mal à l'aise. La liberté d'expression concerne la liberté d'expression. Lorsque vous dites non et que vous ne pouvez plus rien dire, il n'y a plus de liberté de parole. Vous devez vous rappeler de ce que la liberté d'expression fait. Vous devez vous rappeler qu'un Anglais a été banni pendant trois mois pour avoir contesté les chiffres de la Shoah. Pour ma part, je ne les ai pas contestées, mais je peux dire que je ne sais pas qui a fourni ces chiffres. Si c'est quelqu'un qui est en faveur, vous obtenez un chiffre, si c'est quelqu'un qui est contre, vous en obtenez un autre. J'accepte donc qu'il y ait eu un génocide et que beaucoup de Juifs aient été tués. Vous savez, pendant la guerre, je me souviens d'une fois où j’ai eu beaucoup de sympathie pour eux alors que vous n’êtiez même pas là. Moi, j'étais là !
Romy Ronen l'a alors interrompu et lui a rétroqué : "Ma grand-mère était là, elle aussi, dans la Shoah." Le Premier ministre malaisien a alors répondu qu'il en avait "assez entendu". Sa réponse a légitimé sa conviction qu'être antisémite est tout à fait légitime, en raison du droit à la liberté d'expression. Les étudiants juifs de Columbia ne se sentent inévitablement pas en sécurité, face à un environnement aussi hostile qui excuse des positions ouvertement antisémites.
L'Université de Columbia a-t-elle contacté SSI pour expliquer pourquoi Mahathir Bin Mohamad avait été invité et pour formuler des excuses ?
Nous avons contacté le Président de l'Université Columbia, Lee Bollinger, qui a répondu. Nous avons ensuite contacté le professeur qui a introduit Mahathir Bin Mohamad. Le professeur en question a dans un premier temps dénoncé les propos de l'invité. Aucune excuse n'a été faite par la suite.