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Le procès de Mehdi Nemmouche, accusé d’avoir tué quatre personnes au Musée juif de Belgique en mai 2014, a pris une tournure absolument irréelle. Celle de la dénonciation d’une machination orchestrée par le Mossad, l'un des services secrets israéliens. Celle de la diffusion de théories complotistes ignobles, au coeur même d'une Cour d'assises européenne.
Yohan Benizri, Pésident du Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique a répondu aux questions du Crif.
Le Crif - Yohan Benizri, vous êtes avocat et Pésident du Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique. Quel est votre sentiment face à ce qui se passe en ce moment dans la Cour d'assises du procès de Mehdi Nemmouche ?
Yohan Benizri : Je pense qu'il faut d'abord rappeler une chose importante, à savoir l'historique des avocats de la défense en matière de complotisme et d'antisémitisme. Dans le cadre de deux affaires précédentes, ils se sont déjà illustrés par leur antisémitisme. Lors de la défense de Laurent Louis d'abord, puis de Dieudonné qui leur a d'ailleurs remis une "quenelle d'or" à l'issue du procès duquel il avait été condamné. A l'époque, ils avaient principalement influencé la presse et l'opinion publique. Cette fois, ils agissent directement dans la Cour d'assises, au coeur de l'institution judiciaire de notre pays.
Il n'y a rien d'étonnant à voir ces théories fumeuses sortir de leur plaidoiries. C'est une ignominie, mais ça n'a malheureusement rien d'étonnant venant d'eux. Selon moi, la pire erreur serait de rentrer dans un débat qui n'a pas lieu d'être et de tenter d'expliquer point par point ce qu'il s'est passé. Cela donnerait du crédit aux thèses qu'ils présentent. Il faut au contraire les traiter avec la seule chose qu'elles méritent : notre mépris le plus total. Plus ils seront vus comme ridicules, mieux tout le monde se portera.
Ce qui se joue dans ce procès et avec cette défense, c'est de savoir si les avocats vont réellement parvenir à surfer sur un vecteur de haine populiste. Il n'y a absolument rien ni de sérieux, ni de solide dans leurs plaidoiries, c'est pourquoi ils ont recours à ces théroies complotistes.
Est-il possible que ces théories complotistes soient réellement entendues par les jurés et les juges ?
Bien entendu, il y a une véritable crainte au sein de la communauté juive de belgique quant à l'influence que pourraient avoir ces théories. Cependant, il ne faut pas oublier que tout le travail d'enquête a été fait avec le plus grand sérieux. Le procès est foncièrement à charge contre le principal accusé. La Cour le sait parfaitement. Il faut garder en tête tout le sérieux que l'on trouve dans une Cour de justice.
Par ailleurs, ce procès soulève le problème du complotisme de manière générale et de sa prolifération, notamment sur les réseaux sociaux. Ce fléau n'a pas attendu les plaidoiries des avocats de la défense pour se propager.
Quel est le sentiment actuel de la communauté juive belge face à l'ignonimie de ces théories ajoutée à l'émotion du souvenir de l'attentat de 2014 ?
Les Belges juifs ont été extrêmement touchés par le terrible attentat de 2014 dont le caractère antisémite a toujours été reconnu. Mais la communauté juive est résiliente et utilise les outils démocratiques à sa disposition pour se relever. C'est d'ailleurs pour cela que le CCOJB s'est portée partie civile pour ce procès.
Il y a évidemment un certain dégoût à entendre ces ignobles théories se diffuser pendant ce procès et de la part des garants de la loi. Au souvenir douloureux de l'attentat s'ajoute une colère et une incompréhension. C'est une double peine pour la communauté juive, et pour la communauté nationale.
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