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Article publié par le Centre d'Etudes et de Recherches en Sciences Politiques (CERSP)
BDS qualifie Israël dans toute sa communication non pas d’Etat sioniste mais d’Etat d’apartheid. Ce terme fait bien évidemment directement écho à la lutte contre la ségrégation raciale en Afrique du Sud qui est une constante au sein du mouvement national palestinien.
Pour BDS, le boycott d’Israël est un devoir moral
Il existerait tout d’abord un apartheid à l’intérieur même de l’Etat hébreu puisque les droits des Juifs n’y sont pas les mêmes que les droits des non-Juifs. Il existerait ensuite un apartheid extérieur puisque le droit de retour est autorisé pour les Juifs mais interdit pour les Palestiniens. Ainsi la loi israélienne confère aux Juifs du monde entier le droit d’entrer en Israël et d’obtenir la citoyenneté israélienne, quel que soit leur pays d’origine alors que les Palestiniens sont privés d’un droit comparable. Il existerait un apartheid extérieur encore dès lors que les droits des 350.000 colons juifs sont différents des droits des Palestiniens en Cisjordanie occupée puisque les premiers sont soumis au droit civil israélien alors que les seconds sont régis par le droit militaire.
Le boycott d’Israël serait donc pour le collectif palestinien comme pour ses soutiens occidentaux un devoir moral.
"Ce que le BDS entend faire passer à la communauté internationale lorsqu’il accole le terme « apartheid » à celui de l’État d’Israël n’a donc en réalité strictement rien à voir avec la lutte contre la ségrégation raciale en Afrique du Sud."
Le crime d’apartheid en droit international
En accolant systématiquement le qualificatif « d’apartheid » à l’Etat d’Israël, le message que BDS entend faire passer à la communauté internationale va cependant bien au-delà de la simple référence à l’apartheid sud-africain.
Pour le collectif palestinien, la reconnaissance par la communauté internationale de l’Etat d’Israël « en tant qu’Etat juif » est une erreur historique car « elle contient inévitablement la légitimation d’un régime dans lequel l’appartenance ethnico-religieuse ou raciale de quelqu’un constitue le critère de base pour un système institutionnel universel de ségrégation tenant à privilégier les uns et à discriminer les autres » [2]. Pour BDS, le crime d’apartheid, le caractère juif de l’Etat d’Israël, se situe donc dans la conception même de l’Etat.
Or l’apartheid est considéré par le droit international comme le deuxième crime le plus grave contre l’Humanité (le génocide étant le premier). Le crime international d’apartheid est défini dans l’article II de la Convention internationale de 1973 sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid qui énonce ce qui suit : « L’expression « crime d’apartheid », qui englobe les politiques et pratiques semblable de ségrégation et de discriminations raciales, telles qu’elles sont pratiqués en Afrique australe, désigne les actes inhumains indiqués ci-après, commis en vue d’instituer ou d’entretenir la domination d’un groupe racial d’êtres humains sur n’importe quel autre groupe racial d’êtres humains et d’opprimer systématiquement celui-ci ». Il est également repris à l’article 7 du Statut de Rome établissant le cadre légal de la Cour pénale internationale qui indique ce qui suit : « Par « crime d’apartheid », on entend des actes inhumains …commis dans le cadre d’un régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un groupe racial sur tout autre groupe ou tous autres groupes raciaux et dans l’intention de maintenir ce régime.
Le véritable message de BDS sur l’apartheid n’est pas celui que l’on croit
En d’autres termes, pour le collectif palestinien et ses soutiens occidentaux, le fait pour les Juifs d’avoir un Etat au sein duquel ils seraient majoritaires et où ils auraient un droit exclusif au retour est constitutif d’un crime aussi grave que le crime nazi.
Tel est plus que probablement le message subliminal que BDS entend faire passer à la communauté internationale lorsqu’il accole le terme « apartheid » à celui de l’État d’Israël. L’utilisation de ce qualificatif n’a donc en réalité strictement rien à voir avec la lutte contre la ségrégation raciale en Afrique du Sud.